(RSF/IFEX) – RSF s’alarme de la grave détérioration de la liberté de la presse dans le royaume, ces derniers mois. Depuis le début de l’année, les atteintes à la liberté de la presse se sont multipliées, notamment ces derniers jours, avec l’arrestation de trois journalistes français et les menaces d’un ministre envers un journaliste marocain. […]
(RSF/IFEX) – RSF s’alarme de la grave détérioration de la liberté de la presse dans le royaume, ces derniers mois. Depuis le début de l’année, les atteintes à la liberté de la presse se sont multipliées, notamment ces derniers jours, avec l’arrestation de trois journalistes français et les menaces d’un ministre envers un journaliste marocain. Robert Ménard, secrétaire général de RSF, estime qu' »il est extrêmement dommage que le Maroc ne tienne pas ses promesses alors que tant de signes encourageants avaient été donnés depuis l’accession de Mohamed VI au trône. L’ensemble de ces mesures traduit une véritable tentative par le pouvoir de reprendre en main la presse qui aborde les sujets jugés ‘sensibles’, comme l’avenir du Sahara occidental, les violations des droits de l’homme sous Hassan II ou les mouvements islamistes ».
Le 12 octobre 2000, les autorités marocaines ont signifié à Iqbal Ilhami, correspondante de la chaîne de télévision qatariote El Jazira, qu’elle ne pouvait plus exercer son métier au Maroc. Alors que la journaliste désirait transmettre des images à sa rédaction, la chaîne publique RTM, par laquelle elle passe habituellement pour diffuser ses reportages, a prétexté des « problèmes techniques » pour refuser. Il semblerait que cette décision soit liée à la détérioration des relations entre le Qatar et le Maroc. Un représentant de Doha à la Fédération internationale de football (FIFA) avait récemment décidé de ne pas soutenir la candidature du Maroc pour l’organisation du mondial 2006.
Du 8 au 10 octobre, trois journalistes de France 3 – Joseph Thual, cameraman, Jean-Marc Pitt, rédacteur et Michel Bernasconi, monteur – ont été assignés à résidence, à Errachidia (est du Maroc). Ils avaient couvert, la veille, le pélerinage de l’association Forum Vérité Justice au bagne de Tazmamart, situé à 60 km d’Errachidia. Les autorités leur reprochaient d’avoir filmé des installations militaires. Les journalistes ont pu regagner la France, le 12 octobre, mais leur matériel a été confisqué. En juin, Thual avait déjà fait l’objet d’une étroite surveillance lors d’un reportage sur l’affaire Ben Barka. Certaines de ses cassettes vidéo avaient été confisquées par les services de douane de l’aéroport de Rabat. À son départ, Hamidou Laânigri, le directeur général de la Direction de la surveillance du territoire (DST), avait déclaré à un journaliste marocain que Thual n’avait « pas intérêt à remettre les pieds au Maroc ».
Le 4 octobre, lors d’un briefing sur la position du Maroc sur le Sahara occidental, le ministre de l’Intérieur, Ahmed Midaoui, a menacé Aboubakr Jamaï, directeur de publication de l’hebdomadaire « Le Journal ». Faisant référence à un entretien du « Journal »
avec le président du Front Polisario – ce numéro avait d’ailleurs été saisi le 15 avril -, le ministre avait déclaré au journaliste : « Si vous refaites ce genre d’interview avec un membre du Front Polisario, je vous interdirai une nouvelle fois…Heureusement que vous n’êtes pas mon fils, sinon je vous aurais cassé la gueule ! », a-t-il ajouté.
Le 5 février, deux hebdomadaires francophones, « Le Reporter » et « Le Quotidien du Maroc/Economie », et un titre arabophone, « Al Moustaquil », ont été saisis pour avoir reproduit, partiellement ou intégralement, un mémorandum du Cheikh Abdeslam Yassine, le chef de la plus importante mouvance islamique du pays. Le 15 février, un numéro de « Jeune Afrique-L’Intelligent » a été interdit. Il contenait un texte d’un intellectuel marocain résidant au Québec, Abdellah Labdaoui, qui s’interrogeait sur la capacité de Mohammed VI à mener de réelles réformes et à punir ceux qui ont violé les droits de l’homme sous le règne de son père. Le 4 mars, le quotidien français « Le Figaro » n’est pas paru dans les kiosques marocains. Ce numéro contenait un article sur le livre du médecin personnel du roi Hassan II, François Cléret. Selon ce dernier, « le corps [de l’opposant Mehdi Ben Barka] a été…découpé en morceaux sur ordre de Hassan II et porté au Maroc dans les valises diplomatiques ». Le 15 avril, les hebdomadaires « Le Journal » et « Assahifa », tous deux imprimés en France, ont été interdits d’entrée au Maroc. Dans son dernier numéro, « Le Journal » avait publié un entretien avec le président du Front Polisario, Mohammed Abdelaziz. L’hebdomadaire « Assahifa », qui n’a pas publié cette interview, a simplement payé le fait d’appartenir au même groupe que « Le Journal ».