Depuis le début de 2013, deux radios afghans ont été fermées par les autorités et au moins 12 journalistes agressés ou interpellés par la police dans différentes régions du pays.
(RSF/IFEX) – Reporters sans frontières s’inquiète de la recrudescence des agressions envers les journalistes en Afghanistan et des sanctions prononcées à l’encontre de médias. Depuis le début de l’année, deux radios ont été fermées par les autorités et au moins 12 journalistes agressés ou interpellés par la police dans différentes régions du pays.
« Nous appelons les autorités à assumer leur devoir en garantissant la sécurité des journalistes et le respect du droit d’informer. La défiance et l’attitude accusatoire des autorités vis-à-vis des médias et des journalistes mettent en péril la liberté d’information. Un terme doit être mis aux menaces envers les médias et à l’impunité des agresseurs de journalistes », a déclaré Reporters sans frontières.
Le 27 février 2013, Taymour Shah Sahzadeh, journaliste et directeur de la radio Galat jagh, dans la province Zabol (sud-est du pays), a été interpellé et détenu pendant quatre heures par la police. Depuis, la diffusion des programmes de la radio a été suspendue. Contacté par l’organisation, le 3 mars 2013, Abdolsedigh Mirvissi, rédacteur en chef de la station, a confirmé la suspension de son média : « La radio a été sanctionnée pour la diffusion d’un reportage sur une manifestation populaire contre la corruption, et la diffusion du discours d’un député sur le même sujet. » La radio Galat jagh, diffuse ses programmes grâce au soutien de l’International Security Assistance Force (ISAF), qui a procédé à leur suspension sur demande du gouverneur et député du Zabol, directement mis en cause par les manifestants.
Le 14 février 2013, Radio Nassim, une autre radio locale basée dans la province de Daykandi (centre du pays), avait été victime de la pression exercée par le gouverneur, le chef de la police et les responsables locaux du ministère de l’Information et de la Culture. Mohammad Reza Vahedi, le directeur de la radio, avait déclaré à l’Agence Pajhwok : « Le gouverneur avait interdit aux fonctionnaires de répondre à nos questions, et le ministère de l’Information et de la Culture, suite à la diffusion de l’une des nos émissions sur la situation de sécurité dans la province, a illégalement insisté pour que l’on divulgue notre source ». Le gouverneur et le responsable local du ministère ont démenti cette information, mais les informations recueillies par l’organisation confirment les pressions exercées sur les médias indépendants.
Le 24 février 2013, dans la ville de Jalalabad, chef lieu de la province de Nangarhâr (Est du pays) une dizaine journalistes ont été agressés et menacés par les services de sécurité tandis qu’ils couvraient des attaques kamikazes visant un centre des forces de sécurité. Les professionnels des médias ont tous été empêchés par les responsables de la sécurité d’accéder au bâtiment. Zyar Khan Yad, reporter pour la Télé Jondon, a déclaré aux médias « J’ai été agressé à trois reprises au cours des quinze minutes pendant lesquelles je filmais l’évènement ». Un mois auparavant, dans la ville de Kaboul, plusieurs autres journalistes avaient également été victimes de la violence des forces de l’ordre.
Le 17 février 2013, à Kaboul et dans la province du Badakhshan (nord de Kaboul), un journaliste et une réalisatrice ont été menacés par des individus inconnus, se présentant comme proches des autorités. Hamed Abidi, directeur de l’hebdomadaire Les jeunes actifs, a été menacé par téléphone suite à la publication d’un article sur la construction d’un parking privé dans la ville de Kaboul. La photographe Farzaneh Vahedi avait quant à elle été menacée après avoir réalisé un documentaire sur les activités d’une association caritative d’aide aux femmes.
Reporters sans frontières s’inquiète également des déclarations de plus en plus accusatrices des autorités afghanes à l’encontre des médias et des journalistes, et de leurs décisions restrictives à l’égard de la liberté d’information. Le 26 février 2013, le conseil des ministres a décidé d’interdire « l’utilisation des accents et des langues étrangères à la radio et à la télévision ». Le 1er octobre 2012 déjà, le Président Karzai avait ordonné au ministère de la Culture et l’Information, de poursuivre les médias agissant contre « l’intérêt national ».
Ces termes, trop vagues, ont souvent été utilisés par les autorités pour interdire les émissions de télévision. Les accusations portées sous couvert « d’intérêt national », « d’anti-islamisme » et maintenant « d’accents et de langues étrangères », sont les principaux axes de censure en Afghanistan.
L’Afghanistan se situe à la 128ème position (+22) dans le classement de la liberté de la presse 2013 dressé par Reporters sans frontières.