(JED/IFEX) – Ci-dessous, un communiqué de presse de JED daté du 20 décembre 2004 : Nouvelle guerre à l’est de la RD Congo JED dénonce toute tentative d’embrigadement des médias pendant le conflit Journaliste en danger (JED), organisation indépendante et non partisane de défense et de promotion de la liberté de la presse et Réseau […]
(JED/IFEX) – Ci-dessous, un communiqué de presse de JED daté du 20 décembre 2004 :
Nouvelle guerre à l’est de la RD Congo
JED dénonce toute tentative d’embrigadement des médias pendant le conflit
Journaliste en danger (JED), organisation indépendante et non partisane de défense et de promotion de la liberté de la presse et Réseau d’alerte de l’OMAC (Organisation des Médias d’Afrique Centrale), a pris connaissance dans les médias, de la déclaration faite par le Président de la Haute Autorité des Médias (HAM, instance de régulation des médias), M. Modeste Mutinga, lors d’une conférence de presse tenue le vendredi 17 décembre 2004 au Restaurant l’Etoile du Grand Hôtel de Kinshasa portant sur la situation de guerre qui sévit à l’est de la RD Congo.
Tout en reconnaissant la gravité de cette situation qui, selon lui, interpelle chacun où qu’il se situe dans la stratification sociale, et le fait que la guerre est un sujet de médiatisation par excellence, le Président de la HAM écrit, notamment, que « si le militaire a son fusil et ses minutions pour aller au front, le journaliste a sa plume et son micro pour défendre l’unité, l’intégrité et la souveraineté de notre pays.
Dans la même déclaration, tout en « déplorant le déficit de communication qui caractérise toutes les institutions de la transition », le Président de la HAM recommande aux journalistes de recourir, en ce qui concerne la nouvelle guerre à l’est de la RD Congo, aux sources autorisées que sont les Ministères de la Défense, de l’Intérieur, des Affaires Etrangères, de la Presse et Information.
Le président de la HAM a rappelé aux médias et journalistes les prescrits de l’article 78 de la loi N° 96/002 du 22 juin 1996 portant sur l’exercice de la liberté de la presse en RD Congo. Au terme de cet article, sont punis de trahison tous ceux qui, en temps de guerre, auront incité les forces combattantes à passer au service d’une puissance étrangère, sciemment participé à une entreprise de démoralisation de l’armée ou de la population dans le but de nuire à la défense nationale, livré (directement ou indirectement) à une puissance étrangère un renseignement, document ou procédé qui doit être tenu secret dans l’intérêt de la défense nationale.
Face aux menaces que font désormais peser « les structures spécialisées » sur la presse, et à la mise en garde de la HAM, JED fait les observations suivantes :
1. En dépit de la situation confuse qui prévaut depuis plusieurs mois à l’Est du pays, aucun état d’exception n’a été décrété ni à Kinshasa ni ailleurs en RDC. De ce fait, les prescrits des articles 27 à 29 de la Constitution de la transition garantissant la liberté de la presse restent d’application ;
2. Face au mutisme coupable de ceux qui ont l’obligation de donner l’information, entendue comme la relation des faits, les journalistes n’ont plus d’autres choix que de se rabattre sur des sources « non autorisées » qui, c’est un secret de polichinelle, se révèlent souvent plus fiables ;
3. L’obligation de la divulgation maximale des informations d’intérêt public devait être un devoir constitutionnel surtout en temps de crise ou de guerre ;
4. Aucune liste d’informations considérées comme secret défense n’a encore était publiée en RDC, laissant au seul pouvoir public la latitude de distinguer ce qui est du domaine public de ce qui relève du secret défense. Il en est de même de la notion « d’entreprise de démoralisation de l’armée ou de la population », qui ouvre la voie à toutes les interprétations et à tous les abus ;
5. La HAM devait aussi considérer que le refus de donner l’information et la langue de bois, dans le chef de l’autorité publique, à quelque niveau que ce soit, sont des atteintes au droit du public à l’information, surtout en temps de guerre ;
6. En tout temps, la mission principale de la presse consiste à chercher et à diffuser des informations nécessaires à la connaissance et au débat démocratique dans un pays plutôt que de « défendre l’unité, l’intégrité et la souveraineté du pays ».
De ce qui précède, JED demande aux Institutions de la Transition ce qui suit :
1. De ne pas entraver le travail normal des journalistes dans la collecte, le traitement et la diffusion de l’information concernant la situation qui prévaut à l’Est de la RD Congo ;
2. Que le ministère de la Défense, à défaut l’Etat Major général de FARDC (Forces Armées de la RDC), s’engage à donner régulièrement, aux travers des communiqués officiels ou des points de presse, des informations sur la situation du front, et que des journalistes aient la possibilité de poser des questions ;
3. Que les conditions de sécurité soient assurées aux journalistes qui en ont les moyens, de pouvoir se rendre sur le théâtre des opérations militaires ;
4. Que le principe de la divulgation maximale des informations dans le chef de toute autorité publique soit inscrit comme un devoir au nom du droit du public à l’information.
En tout état de cause, JED dénonce toute tentative de musellement ou d’imposition d’une ligne éditoriale aux médias indépendants. De même que toute tentative de se servir de la presse comme bouc émissaire à l’incapacité des institutions de la transition à assumer leurs responsabilités.
Fait à Kinshasa, le 20 décembre 2004