(IIP/IFEX) – Ci-dessous, une lettre de l’IIP au président français Jacques Chirac, datée du 7 octobre 2002, à l’occasion de sa prochaine visite officielle d’État en Syrie : Son Excellence M. Jacques Chirac Président de la République française Palais de l’Elysée 55, rue du Faubourg-Saint-Honoré F 75008 Paris Fax: +33.1.42.92.81.00 Vienne, le 7 octobre 2002. […]
(IIP/IFEX) – Ci-dessous, une lettre de l’IIP au président français Jacques Chirac, datée du 7 octobre 2002, à l’occasion de sa prochaine visite officielle d’État en Syrie :
Son Excellence M. Jacques Chirac
Président de la République française
Palais de l’Elysée
55, rue du Faubourg-Saint-Honoré
F 75008 Paris
Fax: +33.1.42.92.81.00
Vienne, le 7 octobre 2002.
Votre Excellence,
A l’occasion de votre visite officielle d’État en Syrie, dans le cadre de votre voyage au Proche-Orient à la mi-octobre, l’Institut International de la Presse (IPI) souhaite vous mettre au courant de la campagne persistante d’intimidation et de harcèlement dont est victime la famille du journaliste syrien Nizar Nayyouf.
Pour avoir refusé de condamner publiquement en les qualifiant de mensonges des déclarations publiques de M. Nayyouf comme le demandait le gouvernement syrien, la famille de M. Nayyouf a, elle aussi, terriblement souffert des agissements des autorités syriennes. L’IPI souhaite faire part à Votre Excellence de quelques-unes des violations récentes contre la liberté de la presse dans ce pays.
En raison de l’attitude courageuse de Nizar Nayyouf contre le manque de liberté de presse en Syrie, la famille Nayyouf a du faire face à un harcèlement et des violences persistantes ainsi qu’à une menace d’exil forcé. Les membres de sa famille ont subi de la part des autorités des attaques brutales en pleine rue. Ils ont perdu leur travail et ont été empêchés de suivre leur formation universitaire. Leurs lignes téléphoniques ont été coupées. Ayant perdu la possibilité de contact avec le monde extérieur, et hantée par la peur de nouvelles agressions, la famille vit, de facto, en état d’arrestation à domicile dans une isolation quasi-totale. Cette année, une fatwa a autorisé les membres de la Secte Alawate à commettre des actes criminels et des violences contre la famille Nayyouf.
Forcée de vivre de la maigre pension mensuelle de 35 $ du père de Nayyouf, la situation de la famille est devenue encore plus difficile. En dépit de cela, la famille a entrepris une grève de la faim en décembre 2001, geste désespéré, pour obtenir le soutien de la communauté internationale. Leur protestation a cependant été largement ignorée.
La lutte de la famille Nayyouf a commencé en 1992, suite à l’arrestation et à l’emprisonnement de Nizar Nayyouf, condamné à 10 ans de prison pour avoir été membre du Comité Indépendant pour la Défense des Libertés Démocratiques et des Droits de l’Homme, un comité interdit en Syrie, et pour avoir fait des reportages sur les violations des droits de l’homme pendant les élections présidentielles de 1991. Pendant son emprisonnement, Nayyouf a été torturé et a été battu si violemment qu’il est, depuis, partiellement paralysé des jambes et presque aveugle.
Cette campagne contre la famille Nayyouf intervient alors que le journaliste se trouve en France pour du traitement médical comportant de la chimiothérapie, rendu nécessaire par des années d’isolation et des tortures infligées à Nayyouf par ses persécuteurs.
C’est pourquoi, l’IPI estime qu’il est nécessaire d’informer l’opinion sur le cas de M. Nayyouf, chaque fois qu’un chef d’État ou de gouvernement se rend en Syrie. De plus, l’IPI reste convaincu que la politique répressive du gouvernement peut être influencée par l’opinion internationale. A preuve la décision du gouvernement syrien de relâcher Nayyouf en mai 2001. Depuis sa libération, Nayyouf est devenu le président de l’Organisation Arabe pour la Défense de la Presse et pour la Liberté d’Expression, et il a publié de nombreux articles sur le manque de liberté de presse en Syrie. Ceci a eu pour conséquence l’intensification de la persécution de Nayyouf et sa famille.
Malheureusement, l’intérêt de la communauté internationale pour Nayyouf et sa famille semble diminuer malgré la persistance de la violence, celle-ci concernant surtout la famille du journaliste.
Si les déclarations du Président syrien, Bashar-al-Assad, pouvaient être considérées comme la mesure de réforme politique, la Syrie semblerait se diriger vers plus d’ouverture et des libertés plus grandes. Cependant, comme le prouve le cas de Nayyouf et sa famille, la réforme politique n’est qu’un effet d’annonce alors que l’oppression reste la réalité quotidienne en Syrie. Après avoir inspiré des journalistes partout dans le monde par sa lutte contre l’oppression, c’est maintenant au tour de la famille de Nizar Nayyouf de nous rappeler que la lutte pour la liberté a un prix très élevé.
L’IPI, est aussi très préoccupé par la décision des autorités syriennes en septembre de cette année de procéder aux arrestations de Ghosob al-Malla, Mohammad Farouq al-Homsi et Mohammad Kheir Beik, accusés d’avoir mis en circulation une publication sur la situation des droits de l’homme en Syrie sans en avoir demandé l’autorisation.
Les autorités ont aussi lancé un mandat d’arrêt à l’encontre de Haitham al-Maleh, président de l’Association des Droits de l’homme en Syrie (HRAS). Ce dernier, qui se trouve actuellement en Jordanie pour un traitement médical, est aussi accusé d’avoir propagé des mensonges à l’étranger. L’HRAS confirme qu’il avait envoyé un exemplaire de leur publication, « Tayyrat », imprimée à Beyrout, au Président syrien, Bashar al-Assad, avec l’intention de demander une licence d’édition. Maleh, Homsi et Kheir Beck sont accusés d’avoir rejoint une association politique de caractère international sans l’autorisation du ouvernement, et d’avoir publié un journal polémique. Malla est accusé de participation à ce journal.
De plus, l’IPI est profondément préoccupé par le refus des autorités syriennes de renouveler l’accréditation du correspondant de l’Agence France Presse (AFP), M. Maher Chmaytelli, d’origine libanaise et de nationalité française. D’après les informations dont dispose l’IPI, Chmaytelli avait été accrédité en octobre 2000 pour exercer en Syrie où il était le seul correspondant des médias étrangers en résidence. Bien qu’ayant travaillé dans le respect des lois en vigueur et de la déontologie de l’AFP et n’ayant pas violé les lois syriennes, les autorités ont fait savoir à Chmaytelli en mars dernier que son accréditation ne serait pas renouvelée. Selon des sources journalistiques, Chmaytelli est accusé d’avoir écrit des articles non conformes à la ligne gouvernementale officielle, et d’avoir, par conséquent, travaillé contre les intérêts syriens.
L’IPI, réseau mondial d’éditeurs, de cadres des médias et de grands journalistes, lance un ardent appel à Votre Excellence pour qu’elle condamne la campagne permanente contre Nizar Nayyouf et sa famille, demande la fin de la détention de Malla, Maleh, Homsi et Kheir Beik, condamne le refus de la Syrie de renouveler l’accréditation de M. Chmaytelli, et fasse part au Président al-Assad de cette requête en faveur des droits de l’homme et pour une véritable réforme politique en Syrie.
En vous remerciant de l’attention que vous voudrez bien porter à notre démarche nous prions d’agréer l’assurance de notre très haute considération.
Johann P. Fritz
Directeur
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Président de la République française
Palais de l’Elysée
55, rue du Faubourg-Saint-Honoré
F 75008 Paris
France
Fax: +33 1 42 92 81 00Envoyer des copies de vos protestations à l’initiateur si possible.