Juste avant sa mort, Jean-Léonard Rugambage avait publié un article accusant les autorités d'être responsables de la tentative d'assassinat perpétrée, le 19 juin 2010, à Johannesburg, contre le général en exil Kayumba Nyamwasa.
(RSF/IFEX) – Le 21 septembre 2011 – La cour suprême du Rwanda a rendu son verdict, le 15 septembre 2011, dans le procès des deux meurtriers présumés du journaliste Jean-Léonard Rugambage, rédacteur en chef adjoint du bimensuel Umuvugizi, abattu de quatre balles à bout portant devant son domicile de Kigali, le 24 juin 2010. Didace Nduguyangu a été condamné à dix ans de prison tandis qu’Antoine Karemera, officier de police, a été innocenté. A ce jour, les interrogations sur la culpabilité de ces individus et sur la capacité de la justice à délibérer de manière indépendante restent entières.
« La décision de la justice rwandaise nous laisse très sceptiques. Elle pose davantage de questions qu’elle n’apporte de réponses. Pourquoi l’un des suspects est-il condamné et l’autre relaxé? Pourquoi les avoir maintenu tous les deux en détention alors que seul le premier avait reconnu sa culpabilité? Est-il vraiment coupable et écope-t-il d’une sanction adéquate? », s’interroge Reporters sans frontières.
« Après l’assassinat du journaliste, nous avions demandé à la France, qui rétablissait ses relations diplomatiques avec le Rwanda, et à la délégation de l’Union européenne à Kigali de veiller à la mise en place d’une enquête indépendante sur cet homicide. Cette requête est restée sans suite. La seule piste de la vengeance personnelle a été étudiée, pas celle de l’implication possible des autorités rwandaises », a ajouté l’organisation.
Juste avant sa mort, Jean-Léonard Rugambage avait publié un article accusant les autorités d’être responsables de la tentative d’assassinat perpétrée, le 19 juin 2010, à Johannesburg, contre le général en exil Kayumba Nyamwasa. Le rédacteur en chef d’Umuvugizi, Jean-Bosco Gasasira, avait à l’époque accusé le gouvernement d’avoir commandité l’assassinat de son employé, des allégations jugées « sans fondements » et rejetées par la ministre des Affaires étrangères, Louise Mushikiwabo.
Le 28 juin 2010, la police avait procédé à l’arrestation de deux suspects. Selon les autorités, l’un d’entre eux, Didace Nduguyangu, était passé aux aveux et avait expliqué à la police qu’il avait « commis cet acte pour se venger de ce journaliste qui a massacré son frère pendant le génocide commis contre les Tutsis en 1994. »
Accusé de « meurtre » pendant la période génocidaire, puis condamné à un an d’emprisonnement pour « outrage à la cour », Jean-Léonard Rugambage avait été détenu pendant onze mois, entre 2005 et 2006, avant d’être finalement acquitté.
Les 12 et 13 septembre derniers, Reporters sans frontières a soulevé la question du manque de liberté de la presse au Rwanda à l’occasion de la venue en France du président Paul Kagamé. L’organisation a d’abord interpellé le chef de l’Etat rwandais lors d’une conférence tenue à l’IFRI avant de manifester devant l’hôtel Ritz, à Paris, où il recevait une délégation du patronat français.
Lire le rapport sur le Rwanda dans le classement 2010 de RSF