Kavumbagu est emprisonné sous une accusation de trahison depuis juillet 2010 pour un article d'opinion critiquant les forces de sécurité du pays.
(CPJ/IFEX) – New York, le 14 avril 2011 – Au Burundi, un procureur de la République a demandé mercredi à un panel de trois juges d’infliger une peine de prison à perpétuité au journaliste Jean-Claude Kavumbagu, emprisonné sous une accusation de trahison depuis juillet 2010 pour un article d’opinion critiquant les forces de sécurité de ce pays, selon des journalistes locaux.
Ce procureur, Marc Ndabakeshimana, a requis la peine de prison à perpétuité malgré une lettre officielle du CPJ, demandant au ministre burundais de la Justice d’exhorter le ministère public à l’abandon des poursuites contre M. Kavumbagu, directeur du journal en ligne Net Press.
Les avocats de la défense, Gabriel Sinarinzi et Bernard Maingain, ont demandé mercredi la libération de M. Kavumbagu, soulignant que l’accusation de trahison contre ce journaliste n’est applicable qu’en temps de guerre, a dit Me Sinarinzi au CPJ. La défense a également indiqué que les accusations de diffamation contre l’armée et la police étaient infondées car le code pénal burundais limite le recours à de telles charges aux cas où les présumés diffamés sont des individus ou des groupes d’individus, mais pas lorsqu’il s’agit d’organismes institutionnels. La cour a 60 jours pour rendre son verdict.
M. Kavumbagu a été arrêté pour un article sans signature qui a mis en doute la capacité des forces de sécurité à empêcher un attentat terroriste comme ceux du 11 juillet 2010 en Ouganda. Le groupe d’insurgés somaliens Al-Shabaab avait revendiqué deux explosions qui ont fait 76 victimes. L’Ouganda et le Burundi sont les seuls pays africains à avoir dépêché des troupes de maintien de la paix en Somalie, sous la bannière de l’Union africaine (UA).
« Jean-Claude Kavumbagu est détenu sous une accusation de trahison, un chef d’inculpation qui n’est applicable aux civils qu’en temps de guerre selon le code pénal burundais », a déclaré Tom Rhodes, consultant du CPJ pour l’Afrique de l’Est. « Le Burundi n’était pas en guerre lorsqu’il a écrit son article. Le Burundi devrait donc libérer immédiatement ce journaliste et abandonner les poursuites contre lui », a-t-il ajouté.
M. Kavumbagu est placé en détention provisoire depuis près de neuf mois par le ministère public, une décision qui n’est applicable qu’aux prévenus s’étant déjà soustraits aux obligations découlant des mesures de contrôle judiciaire prescrites, selon les avocats de la défense. Cinq gouvernements burundais ont successivement arrêté M. Kavumbagu pour ses reportages indépendants, a-t-il confié aux représentants du CPJ lors d’une visite en décembre à la prison de Mpimba à Bujumbura, la capitale. Le dossier d’arrestations antérieures de Kavumbagu montre qu’il ne représente aucun risque de fuite.
Il convient de rappeler que la demande de libération sous caution de M. Kavumbagu a été rejetée en novembre 2010. Il est emprisonné avec des criminels de droit commun à la prison de Mpimba, conçue pour 800 détenus mais qui en abrite 3500 actuellement.