Après une dizaine de jours de blocage du service Twitter par SMS de l'opérateur MTN Cameroun, RSF peine à savoir avec certitude si le service a été rétabli.
(RSF/IFEX) – Le 22 mars 2011 – Après une dizaine de jours de blocage, sur décision du gouvernement, du service Twitter par SMS de l’opérateur MTN Cameroun, Reporters sans frontières peine à savoir avec certitude si le service a été rétabli. Les recherches de l’organisation se heurtent à des versions contradictoires.
Le 21 mars 2011, de nombreux tweets faisaient état de la reprise effective du service. Contacté par téléphone, le ministre camerounais des Télécommunications, Jean-Pierre Biyiti Bi Essam, confirmait l’information en déclarant à Reporters sans frontières : « Ce n’est pas suspendu. La mesure a été levée. Je n’ai rien de plus à dire à ce sujet ».
Mais le 22 mars, MTN n’abondait pas dans ce sens. « Le service est momentanément interrompu. Il est actuellement indisponible. Si vous lisez sur Internet que Twitter a été rétabli, en tout cas, nous n’avons pas cette information à notre niveau », affirmait une opératrice de MTN à Reporters sans frontières.
Reporters sans frontières dénonce l’opacité entourant cette question et s’inquiète pour l’avenir de la liberté d’expression en ligne au Cameroun. Le blocage de Twitter SMS ne doit pas être le prélude à d’autres types de censures des services de téléphonie mobile ou à une reprise en main d’Internet par les autorités. Tout se passe comme si les autorités camerounaises s’essayent au blocage du microblogging. En toutes circonstances, nous déplorons les réflexes de censure, d’autant plus lorsqu’ils visent à étouffer l’expression pacifique des opinions.
Le 8 mars 2011, l’opérateur de téléphonie MTN Cameroun annonçait à ses abonnés la suspension de son service Twitter par SMS, « pour des raisons indépendantes de [sa] volonté ». Ce programme permet de poster des tweets en envoyant des SMS au numéro 8711, depuis un téléphone portable abonné à MTN. Twitter restait cependant accessible dans le pays via Internet. Alors que MTN Cameroun avait d’abord évoqué une panne, l’opérateur a ensuite admis avoir bloqué le service sur ordre du gouvernement. Le responsable de l’information de MTN, Georges Mpoudi, tweetait le jour-même de la suspension : « La suspension de SMSTweets fait suite à un ordre du gouvernement pour des « raisons de sécurité ». Nous ne pouvons en dire davantage ».
Le ministre camerounais de la Communication, Issa Tchiroma Bakary, a déclaré à l’Agence France-Presse, le 11 mars 2011 : « Je n’ai pas une connaissance parfaite de la situation mais je vous rappelle une chose : la protection de la Nation relève de la compétence du gouvernement ».
Compte tenu de la faible pénétration des réseaux sociaux au Cameroun (Facebook par exemple, n’est utilisé que par 1,5% de la population), et particulièrement de ce service, seules une cinquantaine de personnes étaient touchées par cette restriction. La mesure avait cependant suscité une forte mobilisation parmi les utilisateurs de Twitter, notamment via le hashtag #SMSTweet.
La suspension de ce service, intervenue à la suite de manifestations contre le président Paul Biya, à la fin février 2011, fait craindre une tentative d’étouffement de l’usage des réseaux sociaux dans le pays, alors que ceux-ci jouent un rôle crucial dans les mouvements de contestation politiques qui traversent le monde arabe.
Alors que 2011 sera une année cruciale pour le Cameroun, avec une élection présidentielle prévue en octobre, Reporters sans frontières fait savoir aux autorités qu’elle sera particulièrement attentive, cette année, au respect de la liberté de la presse et à celle de la circulation de l’information sur Internet.