Le journaliste avait déjà fait l'objet d'une série de menaces bien documentées pour ses reportages critiques. L'Instituto Prensa y Sociedad (IPYS) a signalé trois incidents pour la seule année 2022.
Cet article a été initialement publié sur rsf.org le 21 janvier 2025.
Reporters sans frontières (RSF) condamne fermement l’assassinat du journaliste et propriétaire de Cadena Sur TV, Gastón Medina Sotomayor, et adresse ses plus sincères condoléances à sa famille et à ses collègues. Nous demandons aux autorités locales et nationales de mener une enquête rapide, approfondie et transparente sur ce cas emblématique afin de lutter contre l’impunité des crimes commis contre les journalistes et de démontrer l’engagement du gouvernement à protéger la liberté de la presse.
Gastón Medina Sotomayor a été abattu le 20 janvier 2025, alors qu’il quittait son domicile pour animer sa deuxième émission de la journée sur Cadena Sur TV, la chaîne de télévision dont il était le propriétaire. Lors de son émission précédente, Gastón Medina Sotomayor avait mis en lumière des informations trompeuses publiées par la municipalité provinciale d’Ica concernant des irrégularités dans l’achat de camions poubelles – et avait promis de révéler d’autres détails lors de son émission suivante. Alors qu’il quittait son domicile vers 11 h 45, un homme à moto lui a tiré dessus à plusieurs reprises. Malgré les efforts d’un collègue pour l’emmener à l’hôpital, Gastón Medina Sotomayor a succombé à ses blessures.
Le journaliste avait déjà fait l’objet d’une série de menaces bien documentées pour ses reportages critiques. L’Instituto Prensa y Sociedad (IPYS) a signalé trois incidents pour la seule année 2022 : en février, Gastón Medina Sotomayor a reçu un arrangement floral funéraire ; en juillet, la façade de sa chaîne de télévision a été vandalisée avec de la peinture et des excréments ; et en septembre, un bâton de dynamite a été déposé devant les locaux de sa chaîne. Les médias locaux et l’Association nationale des journalistes (ANP) rapportent également que Gastón Medina Sotomayor avait déjà reçu des menaces pour ses critiques des institutions publiques et sa couverture de l’extorsion des chauffeurs de transport dans la région côtière du Pérou.
Les autorités locales étaient au courant de ces attaques persistantes, ce qui souligne leur incapacité flagrante à fournir une protection adéquate au journaliste, malgré des signes évidents que sa vie était en danger.
“Le gouvernement de la présidente Dina Boluarte doit faire preuve d’une volonté politique décisive en veillant à ce que l’enquête sur l’assassinat de Gastón Medina Sotomayor soit d’une rigueur et d’une transparence exemplaires. Le système judiciaire doit remplir son devoir pour que ce meurtre ne reste pas impuni. Faire en sorte que justice soit rendue à Gastón Medina Sotomayor permettra non seulement d’honorer sa mémoire, mais aussi d’envoyer le message clair que l’impunité des crimes commis contre les journalistes ne sera pas tolérée. Une telle action est cruciale pour démontrer l’engagement du gouvernement à prévenir de nouvelles violences et à protéger la liberté de la presse.
Artur Romeu, directeur du bureau Amérique latine de RSF
L’environnement de la liberté de la presse au Pérou s’est considérablement dégradé ces dernières années. Classé 125e sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2024 de RSF, le pays a connu une érosion constante des libertés journalistiques depuis 2022. Cette tendance inquiétante reflète les menaces croissantes pesant sur les reporters, notamment les violences, l’intimidation et la criminalisation, en particulier dans les régions en proie au crime organisé et à la corruption.