La détention troublante du journaliste Thierry Patrick Ondoua, ainsi que le maintien en détention de cinq autres journalistes en raison de leur travail, soulignent le besoin urgent de réformer les lois du pays pour s’assurer que le journalisme n’est pas criminalisé.
Cet article a été initialement publié sur cpj.org le 24 octobre 2024.
Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) appelle les autorités camerounaises à libérer immédiatement le journaliste Thierry Patrick Ondoua, directeur de publication du bimensuel privé Le Point Hebdo, arrêté mardi à la suite d’un article sur la mauvaise gestion présumée du ministre du Logement, et à abandonner toutes les charges retenues contre lui.
« La détention troublante du journaliste Thierry Patrick Ondoua, ainsi que le maintien en détention de cinq autres journalistes en raison de leur travail, soulignent le besoin urgent de réformer les lois du pays pour s’assurer que le journalisme n’est pas criminalisé », a déclaré Angela Quintal, responsable du programme Afrique du CPJ, à New York. « Les responsables gouvernementaux devraient pouvoir répondre à la couverture médiatique et aux critiques sans recourir à des procédures judiciaires comparables à de la censure. Ondoua et les autres journalistes emprisonnés doivent être libérés immédiatement et ne pas être punis pour avoir fait leur travail. »
Le mardi 22 octobre, la division régionale de la police judiciaire (DRPJ) de Yaoundé, la capitale camerounaise, a convoqué et arrêté Ondoua pour fausses nouvelles, diffamation et outrages à des « organes constitués », qui comprennent des ministres, des députés et certains types de fonctionnaires de l’État, selon les lettres de convocation examinées par le CPJ, et Prosper-Rémy Mimboé, directeur de la rédaction du journal, qui s’est entretenu avec le CPJ. Cette arrestation fait suite à une plainte déposée par Célestine Ketcha Courtès, ministre de l’Habitat et de l’Urbanisme. Selon ces sources, Ondoua est toujours dans l’attente de sa présentation devant le tribunal de Yaoundé. S’il est reconnu coupable, il risque jusqu’à cinq ans d’emprisonnement.
Mimboé a déclaré au CPJ que l’arrestation d’Ondoua était liée à plusieurs articles publiés par Le Point Hebdo critiquant la gestion des politiques de logement par Courtès, parmi lesquels celui publié le 18 juin 2024, dont le CPJ a pu examiner une copie.
Le Cameroun, qui se prépare à une élection présidentielle l’année prochaine et qui pourrait voir l’actuel président Paul Biya, âgé de 91 ans, briguer un huitième mandat, a connu de nombreuses arrestations et suspensions de médias et de journalistes ces dernières semaines en lien avec le report des élections législatives et locales.
Le Cameroun figure au troisième rang des pays d’Afrique subsaharienne qui emprisonnent le plus de journalistes dans le recensement carcéral annuel du CPJ, avec six journalistes emprisonnés au 1er décembre 2023. Le journaliste Stanislas Désiré Tchoua a été libéré le 28 décembre après avoir purgé une peine de prison pour diffamation et outrage.
Les messages du CPJ adressés à Bangté Talamdio, membre du cabinet de Courtès, et les appels aux numéros publics du ministère du Logement du Cameroun, de la DRPJ et du tribunal de première instance de Yaoundé sont restés sans réponse.