Abdellahi Mohamed Ould Atigha a été placé en garde à vue après un post Facebook interrogeant la gestion d’un fonds gouvernemental destiné aux populations pauvres.
Cet article a été initialement publié sur rsf.org le 20 mai 2021.
Un reporter mauritanien a été placé en garde à vue après un post Facebook interrogeant la gestion d’un fonds gouvernemental destiné aux populations pauvres. Reporters sans frontières condamne cette arrestation et appelle les autorités à assurer la liberté de la presse dans le pays.
Deux jours de détention pour une simple publication sur Facebook. Le 24 avril, le rédacteur en chef du journal indépendant Al Hoora, Abdellahi Mohamed Ould Atigha, a été arrêté à son domicile par des policiers et sans convocation préalable. En cause : un post dans lequel il s’interroge sur la gestion par le gouvernement d’un fonds destiné à financer les projets de populations précaires. C’est seulement lors de son arrivée au commissariat de Boutilimit, à une centaine de kilomètres de la capitale Nouakchott, que le journaliste a été informé qu’une plainte, liée à ce post Facebook, avait été déposée contre lui par la ministre des Affaires Sociales, de l’Enfance et de la Famille, Naha Mint Haroun Cheikh Sidiya.
Le journaliste a été libéré 48 heures plus tard, après que le père de la ministre a retiré la plainte. Contacté par RSF, Abdellahi Mohamed Ould Atigha déplore un “manque de transparence de la part des autorités” et regrette une arrestation que “rien ne justifie”.
“Arrêter un journaliste après un simple post sur Facebook qui ne fait que poser des questions est complètement disproportionné, déclare RSF. Cette situation témoigne à la fois d’un dangereux contrôle des réseaux sociaux de la part des autorités, mais aussi d’une volonté manifeste d’étouffer les voix discordantes. L’organisation appelle le gouvernement à assurer l’accessibilité et la transparence des informations dans le pays et à cesser les arrestations arbitraires de journalistes, qui doivent pouvoir exercer leur métier en toute liberté”.
Ce n’est pas la première fois que des affaires gouvernementales de gestion de fonds valent à des journalistes de se faire arrêter en Mauritanie. En 2019, les blogueurs Abderrahmane Weddady et Cheikh Ould Jiddou avaient passé plus de deux mois en prison après avoir relayé, sur leurs réseaux sociaux, une polémique autour d’un fonds de deux milliards de dollars qui aurait été placé par des proches du président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz aux Émirats Arabe Unis.
La Mauritanie a chuté de 46 places depuis 2016 dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF. Elle occupe désormais le 94e rang sur 180 pays en 2021.