(RSF/IFEX) – La session d’automne de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) examinera, le 5 octobre 2004, le respect des obligations et des engagements de l’Azerbaïdjan vis-à-vis du Conseil de l’Europe. Garantir la liberté de la presse fait partie de ces engagements. Comme l’indique un rapport de l’APCE sur le fonctionnement des institutions démocratiques […]
(RSF/IFEX) – La session d’automne de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) examinera, le 5 octobre 2004, le respect des obligations et des engagements de l’Azerbaïdjan vis-à-vis du Conseil de l’Europe. Garantir la liberté de la presse fait partie de ces engagements. Comme l’indique un rapport de l’APCE sur le fonctionnement des institutions démocratiques en Azerbaïdjan, paru le 20 septembre, la situation n’a cessé de se détériorer depuis un an pour les journalistes proches de l’opposition.
« Nous souhaitons que l’APCE dénonce avec la plus grande fermeté la passivité des autorités azerbaïdjanaises face aux violations de la liberté de la presse », a écrit RSF dans un courrier adressé au président de l’Assemblée, Peter Shieder.
« Les responsables des agressions de journalistes lors des événements qui ont suivi l’élection présidentielle d’octobre 2003 doivent impérativement être sanctionnés. Il en va de même pour les individus qui ont attaqué deux journalistes d’opposition en juillet 2004. Les autorités azerbaïdjanaises doivent condamner ces actes et tout faire pour mettre un terme au sentiment d’impunité qui s’est installé depuis un an », a affirmé l’organisation.
« Les articles 147.2 et 148 du code pénal, qui prévoient des peines de prison pour diffamation et offense, doivent être abrogés. La crainte d’être condamnés à une peine de prison ou à une amende d’un montant exorbitant pousse les journalistes à une autocensure généralisée très nuisible à la liberté de la presse ».
« Nous demandons par ailleurs la libération de Rauf Arifoglu, rédacteur en chef du principal quotidien d’opposition du pays, « Yeni Musavat », et vice-président du parti d’opposition Musavat, qui est en détention préventive injustifiée depuis un an », a ajouté l’organisation (consulter des alertes de l’IFEX du 6 août, 23 juin, 17 février et 23 janvier 2004, 10 et 2 décembre, 24 novembre, 30, 27, 24 et 22 octobre 2003).
En 2003, près de 100 journalistes ont été agressés. Au cours des violents affrontements qui ont éclaté les 15 et 16 octobre 2003, au lendemain de l’élection présidentielle, entre des manifestants et les forces de l’ordre, plus de cinquante journalistes qui couvraient l’événement ont subi des violences.
En juillet 2004, deux journalistes d’opposition ont été attaqués. Aydin Gouliev, rédacteur en chef du quotidien d’opposition « Baki Khaber », a été kidnappé et passé à tabac par quatre inconnus à Bakou, le 17 juillet. Ses agresseurs l’ont accusé de ne pas « servir son Etat et l’islam » et ont exigé qu’il cesse toute activité journalistique (consulter l’alerte du 19 juillet 2004). Eynulla Fatullayev, de l’hebdomadaire d’opposition « Monitor », a été violemment frappé à la tête à Bakou, en pleine rue, le 26 juillet. Il est l’auteur de nombreux articles très critiques envers le gouvernement.
Alors que le nouveau gouvernement de Ilham Aliev s’était engagé à identifier et sanctionner les responsables de ces attaques, aucune enquête n’a abouti.
La législation sur la diffamation et l’insulte, qui prévoit des peines de prison, est également à l’origine de nombreuses atteintes à la liberté de la presse.
Le 25 février, un tribunal de Bakou a condamné Rovshan Kebirli, rédacteur en chef du quotidien « Mukhalifat », et Yusif Gambar, auteur de l’article incriminé, à deux ans de prison avec sursis pour avoir diffamé la fédération nationale de Taekwondo. Publié le 18 octobre 2003, ce texte affirmait que des membres de la fédération avaient collaboré avec les forces de l’ordre pour disperser des manifestants qui contestaient l’élection présidentielle du 15 octobre à Bakou (consulter l’alerte du 26 février 2004).
Le 30 août, Gouliev a été condamné à un an de prison avec sursis pour diffamation et insulte envers Jalal Aliev, oncle du chef de l’Etat.
Par ailleurs, le montant exorbitant des amendes infligées aux médias risque d’asphyxier la presse. Le quotidien d’opposition « Yeni Musavat » est menacé de fermeture à cause d’amendes reçues dans le cadre de six procès, dont le montant total approche les 25 000 euros (environ 31 000 $US).
Le 22 septembre, Elmar Huseynov, fondateur et rédacteur en chef de l’hebdomadaire d’opposition « Monitor », et Tarlan Mamedzade, auteur de l’article incriminé, ont été condamnés à une amende d’environ 6 500 euros (environ 8 000 $US) pour avoir « insulté l’honneur et la dignité » d’un député de la majorité, Siyavush Novruzov, dans un article, publié en mars, très critique sur les activités des députés. « Monitor » a fait appel de cette décision, alors qu’il doit faire face à un second procès pour diffamation, initié par un autre parlementaire. Le député Zalimkhan Yagub, dont le nom ne figurait pas dans un article du 3 juillet critiquant durement les parlementaires, demande la fermeture de l’hebdomadaire, l’incarcération de Huseynov et de l’auteur de l’article, Fatullayev, ainsi qu’une amende d’environ 25 000 euros.
Par ailleurs, Fatullayev a été interpellé à l’aéroport de Bakou, le 23 septembre, alors qu’il se rendait à Moscou. Les policiers ont évoqué un ordre du procureur général interdisant au journaliste de quitter le territoire. Quelques heures plus tard, il a été relâché et a pu prendre son vol pour Moscou. « Monitor » est un journal en langue russe, connu pour ses critiques très sévères de la politique du gouvernement azéri.
Enfin, Arifoglu, rédacteur en chef du principal quotidien d’opposition du pays, « Yeni Musavat », et vice-président du parti d’opposition Musavat, est emprisonné à Bakou depuis le 27 octobre 2003. Son procès, ainsi que celui de six autres leaders de l’opposition, a débuté le 7 mai 2004. Il est accusé d’avoir organisé les émeutes qui ont agité le pays à la suite de l’élection présidentielle contestée du 15 octobre 2003. Poursuivi pour « trouble à l’ordre public » et « refus d’obtempérer », il risque sept ans de prison.