Septembre a connu des manifestations et des perturbations d'Internet au Togo et au Cameroun, une initiative visant à accroître la diversité de genre dans la communauté des technologies et des médias du Nigéria et un rapport sur l'accès à l'information qui pourrait aider les pays à atteindre les Objectifs de développement durable de Nations Unies (ODD).
Focus sur le genre: le Naija Data Ladies
Parfois, les nouvelles n’ont aucun sens tant qu’on y voit pas les chiffres. Que ce soit en ce qui concerne l’ampleur d’une sécheresse, l’augmentation rapide des taux d’alphabétisation d’une région donnée ou les disparités de rémunération entre hommes et femmes, le public a besoin d’accéder à des données précises et facilement assimilables afin de saisir pleinement les événements actuels .
C’est pourquoi une initiative telle que le Naija Data Ladies – un réseau de femmes journalistes spécialisées dans les données au Nigeria – est si important. Selon IJNET (International Journalists’ Network/Réseau international des journalistes), le réseau a été créé en avril 2017, dans le but de produire des informations consacrées à l’analyse des données sur des questions de développement et de santé au Nigeria.
Jacopo Ottaviani, qui a guidé la création du Réseau des femmes pour les données, a déclaré à IJNET que l’inspiration pour le projet vient de Chicas Poderosas, un projet qui vise à renforcer les capacités des femmes dans les médias numériques en Amérique latine. Ottaviani et ses collègues ont également été enthousiasmés par « l’idée de façonner les capacités et les compétences des journalistes qui travaillent déjà dans les salles de rédaction nigérianes, qui peuvent ensuite diffuser la culture des données à leurs collègues ».
« Être membre de l’équipe de Naija Data Ladies a fait de moi un meilleur critique de données pour le bénéfice de notre public », a déclaré à IJNET Bukola Adebayo, membre de l’équipe de Data Ladies, « Je suis en mesure de décortiquer des données complexes d’une manière qui les rende plus pertinente et applicable au vécu de nos publics et les engage dans de nouvelles voies ».
Opération censure
Le 12 septembre, des soldats de Umuahia, dans l’état d’Abia, ont pris d’assaut le Centre de presse de l’Union nigérienne des journalistes, frappant les journalistes et confisquant leurs équipements.
Selon RSF, l’attaque est intervenue après que des journalistes ont documenté l’Opération la dance du python Dance – une procession militaire visant à exhiber sa supériorité sur les gens de Biafra, un groupe séparatiste local.
Les commandants locaux de l’armée se sont finalement excusés pour le raid. Mais Clea Kahn-Sriber, responsable du bureau Afrique de RSF, a noté que les remords feraient mieux d’être remplacés par des mesures préventives et de la formation ». Au lieu de réagir après l’événement, le gouvernement du Nigéria devrait s’efforcer de former les forces de sécurité sur le rôle des journalistes dans la société et de favoriser ainsi de meilleures relations entre deux secteurs essentiels dans une démocratie ».
Cependant, en Somalie, il semble qu’aucun niveau de formation ne diminuera la quantité des violences que vivent les journalistes au quotidien.
La Somalie perd encore un autre journaliste
Le 10 septembre, une bombe suicide a explosé dans un café à Beledweyne, en Somalie, tuant au moins 3 personnes et en blessant 10 autres, y compris des journalistes. Des informations des médias citées par le CPJ indiquent que le groupe militant Al Shabaab a revendiqué l’attaque. Le journaliste de 24 ans Abdullahi Osman Moallim a succombé quatre jours plus tard des blessures à la tête subies dans l’explosion de la bombe.
Des sources ont déclaré au CPJ que Moallim et ses collègues étaient au restaurant en attente d’une conférence de presse qui était prévue au bureau du gouverneur de Hiiraan non loin de là.
« Condamner ce meurtre ne suffit pas – les autorités doivent faire plus pour attraper les meurtriers qui ont conçu ce crime odieux et ont déployé le kamikaze » dit un communiqué conjoint publié par le Syndicat national des journalistes somaliens (NUSOJ) et la Fédération internationale des journalistes (FIJ).
Limite d’âge et bagarres parlementaires en Ouganda
Des législateurs, des journalistes et des manifestants ont été victimes des violences lorsque les législateurs ont présenté un amendement constitutionnel visant à supprimer la limite d’âge présidentiel en Ouganda.
Le président Yoweri Museveni – qui est au pouvoir depuis 1986 – a 72 ans. La limite d’âge pour les présidents est de 75 ans, ce qui signifie que, conformément à la loi actuelle, Museveni ne pourra pas postuler pour un autre mandat lors des élections de 2021. Ses partisans cherchent à modifier cela.
Le Réseau des journalistes pour les droits humains – Ouganda (HRNJ-Ouganda) rapporte que le 20 septembre, la police a arrêté cinq journalistes qui couvraient une conférence de presse d’un groupe appelé Jeunesse contre la dictature, qui protestait contre l’amendement constitutionnel sur la limite d’âge. La police a également confisqué leurs enregistreurs. L’un des journalistes a déclaré à HRNJ-Ouganda que la police les avait interrogés sur ceux qui les avaient mobilisés pour couvrir la conférence de presse. Les journalistes ont finalement été libérés et leurs équipements leur ont été restitués.
Quelques jours plus tard, une bagarre rangée a éclaté au Parlement lors de la discussion du projet de loi. Selon Al Jazeera, « les députés brandissaient des microphones débout, donnaient des coups de poing et grimpaient sur des bancs alors que les agents de la sécurité tentaient de dégager 25 législateurs qui encerclaient la présidente Rebecca Kadaga ».
A Kampala, des manifestations qui ont éclaté dans les rues au sujet de ce projet de loi ont également été dispersées avec des gaz lacrymogènes, selon Al Jazeera.
Des journalistes et non des terroristes
Ahmed Abba est devenu un nom familier dans la communauté de la liberté d’expression pour de toutes mauvaises raisons. En fait, le correspondant du service en Hausa de Radio France Internationale a récemment été désigné comme un des lauréats des Prix internationaux de la liberté de la presse du CPJ en 2017, qui se tiendra le 15 novembre. Plus tôt cette année, Abba a été condamnée à dix ans de prison au Cameroun pour « blanchiment du produit d’un acte terroriste » après avoir parlé des activités du groupe extrémiste Boko Haram.
Si le nouveau rapport du CPJ est une indication, Abba n’est pas le seul journaliste qui passera des années de sa vie derrière les barreaux pour avoir fait son travail. Le 20 septembre, CPJ a publié Journalistes, pas terroristes: Au Cameroun, la législation anti-terroriste est utilisée pour imposer silence aux opposants et réprimer la dissidence. Le rapport montre que la loi antiterrorisme du Cameroun est utilisée contre les journalistes qui simplement parlent de Boko Haram ou des troubles civils dans les régions anglophones du Cameroun.
« Lorsque vous assimilez le journalisme au terrorisme, vous créez un environnement où peu de journalistes sont prêts à traiter des informations sensibles par peur de représailles », a dit Angela Quintal, directrice du CPJ Afrique et auteur du rapport. « Le Cameroun doit modifier ses lois et arrêter de soumettre des journalistes – qui sont des civils – à des juridictions militaires », a ajouté Quintal.
La législation n’est pas le seul outil utilisé pour faire taire les Camerounais; la limitation de l’accès à Internet en est un autre.
Le 30 septembre, des militants des régions anglophones du Cameroun ont commencé à avoir du mal à accéder à Facebook et à WhatsApp. Selon Quartz Africa, des militants de l’Etat du Cameroun du Sud / Ambazonia avaient planifié des manifestations pour le 1er octobre pour demander l’indépendance de leur région, qui existait comme entité autonome avant l’unification du Cameroun.
Plus tôt cette année, les résidents des régions anglophones du Nord-ouest et du Sud-ouest du Cameroun ont subi une fermeture d’Internet de 93 jours, provoquant un tollé international et une campagne intitulée #BringBackOurInternet (Ramenez-nous notre Internet).
Dans le Togo voisin, l’accès à Internet n’était pas beaucoup mieux.
La peur de Facebook en Afrique de l’ouest
Le 5 septembre, le service 3G a été perturbé au Togo; Facebook et WhatsApp étaient complètement inaccessibles sur les applications mobiles. Le lendemain, la connexion Internet par câble a également été perturbée, selon des informations obtenues par l’organisation MFWA.
Les perturbations se produisent lorsque la coalition de l’opposition togolaise organisait des manifestations à l’échelle du pays exigeant des réformes politiques et protestait contre la brutalité de la police qui a eu lieu lors des manifestations le mois précédent.
Dès lors, il n’est pas surprenant que le Togo soit parmi les pays à être examiné attentivement par MFWA dans un rapport sur l’accès à Internet.
En septembre, MFWA a publié la première édition de la Surveillance des droits d’Internet en Afrique de l’ouest. Le rapport a couvert la période d’avril-juin 2017 et a examiné l’accès en ligne au Bénin, en Côte d’Ivoire, au Ghana, au Mali, au Niger, au Nigéria, en Gambie et au Togo. Certaines de ses découvertes incluent un manque de cadres juridiques efficaces sur Internet, des infrastructures inadéquates et un coût élevé des données en Afrique de l’Ouest.
L’accès à l’information à travers l’Afrique
Les conversations sur l’accès à Internet ne s’arrêtent pas en Afrique de l’Ouest; ils ont pris une place importante dans les initiatives lancées par les membres de l’IFEX en Afrique pour célébrer la journée de l’UNESCO dite Journée internationale pour l’accès universel à l’information (JIAUI), le 28 septembre.
Par exemple, ARTICLE 19 a créé une infographie qui montre « où le droit de connaître les lois sont en place, où les gouvernements s’engagent envers les organismes de transparence et où il y a encore lieu de progresser » en Afrique. L’infographie est également disponible en français.
Media Rights Agenda (MRA-Nigéria) a organisé la « Semaine de la liberté de l’information » du 25 au 28 septembre 2017, qui a mis en exergue les engagements des médias sociaux sur différents sujets de la liberté de l’information (FOI), y compris l’utilisation par les citoyens de la Loi sur la liberté de l’information , la FOI et les médias, et la FOI et la corruption. Si vous l’avez manqué, vous pouvez toujours vous engager dans la conversation de trois jours en suivant ce hashtag: # MRAFOIWk17.
Media Rights Agenda @MRA_Nigeria will be celebrating the #IDUAI2017 with its « FOI Week » from September 25 to 28, 2017. #MRAFOIWk17 pic.twitter.com/gVLXScOZQz
— Media Rights Agenda (@MRA_Nigeria) September 23, 2017
Kampala, le 27 septembre 2017. Des législateurs de l’opposition ougandaise se battent avec le personnel de la sécurité en civil dans le Parlement pendant qu’ils contestent un projet d’amendement à la limite d’âge proposé au débat pour modifier la constitution afin de prolonger le mandat du présidentREUTERS/James Akena
ARTICLE 19