Toute information “fausse” ou “inexacte” liée au COVID-19 dans les médias et sur les réseaux sociaux est désormais passible d’une amende au Tadjikistan. Selon les amendements au Code administratif, son montant peut atteindre 1160 somoni (995 €), soit environ deux fois le salaire minimum.
Cet article a été initialement publié sur rsf.org le 12 juin 2020.
Le parlement tadjik a approuvé des amendements punissant la publication d’informations “fausses” ou “inexactes” sur le coronavirus. RSF demande le retrait de cette législation susceptible de conduire à des abus et à des actes de censure.
Toute information “fausse” ou “inexacte” liée au Covid-19 dans les médias et sur les réseaux sociaux est désormais passible d’une amende au Tadjikistan. Selon les amendements au Code administratif votés le 10 juin 2020 par le Parlement, son montant peut atteindre 1160 somoni (995 €), soit environ deux fois le salaire minimum.
“Cette nouvelle législation aux contours flous peut facilement être exploitée pour violer le droit à l’information, regrette la responsable du bureau Europe de l’Est et Asie centrale de RSF, Jeanne Cavelier. Au regard du droit international, rien ne justifie qu’une autorité publique ait le pouvoir d’établir le vrai du faux, et de restreindre sans contrôle judiciaire le droit à la liberté d’expression d’une personne ou d’un média au motif que les propos tenus seraient faux ou inexacts. Nous appelons au retrait de ces amendements, attentatoires à la liberté de la presse et d’expression.”
Le site kvtj.info fondé par des représentants de la société civile, qui comptabilise à ce jour près de 430 morts liés au Covid-19 contre 49 officiellement, et bloqué dans le pays depuis le 11 mai, pourrait être la première cible de ces amendements. Sa liste est vérifiée par des journalistes basés à l’étranger. Malgré un pic de décès par pneumonie, les autorités tadjikes ont nié l’épidémie de coronavirus sur leur territoire jusqu’au 30 avril, soit 24 heures avant une visite d’une délégation de l’Organisation mondiale de la santé. Après à peine plus d’un mois de confinement, contre trois mois en général dans des pays mieux équipés, elles estiment que l’épidémie est déjà maîtrisée et s’apprêtent à lever les mesures.
RSF recommande aux autorités tadjikes de lutter contre la désinformation via des mécanismes d’autorégulation favorisant le respect des normes et de l’éthique professionnelles, à l’image de la Journalism Trust Initiative. Lancé par RSF et ses partenaires, ce référentiel pour un journalisme fiable fournit des indicateurs permettant aux médias de s’autoévaluer, de s’y conformer et d’en publier volontairement les résultats, de la transparence sur la propriété des publications et les sources de revenus aux processus de correction.
Le Tadjikistan occupe la 161e place sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2020.