Le 14 novembre 2016, la police de Kélo a ordonné la fermeture des locaux de la radio Barkadjé. Le média avait rapporté la reprise d’affrontements violents entre éleveurs et agriculteurs qui s’opposent dans un conflit foncier dans la région.
Cet article a été initialement publié sur rsf.org le 18 novembre 2016.
Reporters sans frontières (RSF) demande aux autorités locales de la ville de Kélo dans le nord-est du Tchad, de procéder à la réouverture de la radio communautaire Barkadjé et de libérer son responsable.
Le 14 novembre 2016, sur ordre du préfet du département Tandjilé ouest, la police de Kélo, à 400 km au nord-est de N’Djamena, la capitale, a ordonné la fermeture des locaux de la radio Barkadjé. Le média avait rapporté la reprise d’affrontements violents entre éleveurs et agriculteurs qui s’opposent dans un conflit foncier dans la région.
A la suite de cette fermeture arbitraire, le directeur par intérim de la radio, Edmond Kandi Weidigué, a été convoqué le lendemain par la police de Kélo qui lui a reproché la couverture de l’évènement. Le journaliste s’est défendu, arguant que le rôle de Barkadjé était “de rapporter ce qui se passe dans le monde rural afin de mieux sensibiliser les populations à la paix et à la cohabitation pacifique”. Le commissaire de police l’a accusé d’avoir voulu nourrir le conflit et a laissé sous-entendre que la radio était dans le collimateur des autorités locales depuis leur couverture des grèves dans le secteur public.
A l’issue de cette convocation, Edmond Kandi Weidigué a été placé en détention. A ce jour, le journaliste n’a toujours pas été libéré. Aucune charge n’a été retenue contre lui.
“Reporters sans frontières demande la réouverture immédiate de la radio et la libération de son directeur, déclare Virginie Dangles, rédactrice en chef de Reporters sans frontières. Radio Barkadjé n’a fait qu’assurer sa mission en rapportant aux populations rurales une information qui les concerne directement. Sa fermeture est arbitraire et illégale.”
Médias et journalistes font régulièrement l’objet d’attaques de la part des autorités tchadiennes. En juin, RSF avait notamment dénoncé l’arrestation de Madjissembaye Ngardinon, journaliste d’Abba Garde, alors qu’il couvrait une intervention de police. Si exercer le journalisme reste risqué pour les professionnels de médias qui s’exposent à la censure et aux arrestations, accéder à l’information devient de plus en plus complexe pour les Tchadiens.
Depuis l’élection présidentielle qui a reconduit au pouvoir Idriss Déby Itno le 10 avril 2016, les Tchadiens sont privés de réseaux sociaux et de connexion internet mobile. Aujourd’hui encore, pour accéder aux applications et échapper à la surveillance, les internautes doivent contourner la censure via l’utilisation d’applications cryptées ou de VPN. Des installations qui ne sont évidemment pas accessibles à la grande majorité des citoyens tchadiens souhaitant s’informer sur internet.
Le Tchad occupe la 127e place sur 180 pays dans le Classement mondial 2016 de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières.