(RSF/IFEX) – RSF exprime sa très vive préoccupation après la tentative de licenciement d’une journaliste de la télévision d’État en raison de ses prises de position contre la censure. L’organisation s’inquiète également de l’arrestation de trois membres de l’Union des journalistes indépendants de l’Ouzbékistan (UIJU), dont deux pour des affaires de m?urs présumées. « En quelques […]
(RSF/IFEX) – RSF exprime sa très vive préoccupation après la tentative de licenciement d’une journaliste de la télévision d’État en raison de ses prises de position contre la censure. L’organisation s’inquiète également de l’arrestation de trois membres de l’Union des journalistes indépendants de l’Ouzbékistan (UIJU), dont deux pour des affaires de m?urs présumées.
« En quelques jours, au moins deux journalistes ont été licenciés d’une des chaînes d’Etat pour s’être écartés de la ligne officielle ou avoir publiquement dénoncé des violations de la liberté de la presse. Depuis le début de l’année, au moins deux journaux ont été fermés et plusieurs journalistes ont été arrêtés, le plus souvent sous des prétextes fallacieux. Compte tenu de ce contexte répressif, nous craignons que l’arrestation de trois membres d’une organisation de défense de la liberté de la presse, accusés d' »homosexualité » et « abus sexuels », ne soit un nouveau moyen sordide de faire pression, voire de se débarrasser de voix dissidentes qui gênent les autorités », a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de RSF, dans un courrier adressé à Islam Karimov, président de la République. « Nous vous demandons de tout mettre en oeuvre pour que la censure cesse concrètement en Ouzbékistan, pour que les journalistes licenciés soient immédiatement réintégrés dans leur média à leur poste d’origine, et que les défenseurs de la liberté de la presse puissent travailler librement », a-t-il ajouté.
Ruslan Sharipov, président de l’organisation de défense de la liberté de la presse UIJU, et Azamat Mamankulov, membre de l’UIJU, ont été appréhendés dans le centre-ville de Tachkent entre 17h00 et 18h00 (heure locale) dans la soirée du 26 mai 2003. Oleg Sarapulov, lui aussi membre de l’UIJU, a été arrêté dans un bazar, une heure et demie plus tard. Tous trois sont actuellement détenus dans un poste de police à Tachkent. La police a tout d’abord nié la détention des journalistes devant la représentante de l’organisation américaine de défense des droits de l’homme, Human Rights Watch (HRW), Matilda Bogner, et un membre de l’ambassade des États-Unis, avant de la confirmer, dans la matinée du 27 mai à un représentant de l’organisation Freedom House.
Sharipov et Sarapulov, qui sont accusés en vertu des articles 1.20 et 1.35 du code pénal d’être homosexuels et d’avoir payé quatre jeunes hommes entre 16 et 17 ans pour avoir des relations sexuelles avec eux, risquent trois ans de prison. Les deux journalistes ont affirmé à la présidente de la société des droits de l’homme d’Ouzbékistan « E’zguilik », Vasilya Inoyatova, qui a pu leur rendre visite le 27 mai, ne pas connaître les victimes présumées. Aucune accusation n’aurait été retenue contre Mamankulov.
Le 22 février, Sarapulov avait déjà été arrêté et interrogé pendant deux jours par la police, au sujet d’articles de presse tirés d’un site Internet d’opposition qu’il avait sur lui, et de tracts du Hizb ut-Tahrir, un parti islamiste interdit, qui, selon le journaliste, avaient été placés dans ses affaires à son insu. Une enquête avait été ouverte contre lui pour tentative de renversement de l’ordre constitutionnel (consulter l’alerte de l’IFEX du 27 février 2003).
Sharipov, président de l’UIJU et ancien correspondant de l’agence de presse russe Prima News, a été à plusieurs reprises agressé et menacé en raison de ses activités professionnelles en 2001 et 2002 (consulter des alertes de l’IFEX des 8 et 4 février 2002 et 19 juillet 2001).
Par ailleurs, le 24 mai, Elmira Khassanova, journaliste de la quatrième chaîne d’État, a été licenciée pour avoir protesté publiquement contre la censure à la télévision publique. Le 20 mai, la journaliste s’était jointe à une manifestation organisée par la présidente de la Société des droits de l’homme d’Ouzbékistan, Elena Urlaeva, devant le siège de la télévision d’État à Tachkent, contre le licenciement du directeur de l’information de la chaîne, Ahmadjon Ibrahimov. Ce dernier a été sanctionné pour avoir montré en direct le président Karimov sous un mauvais jour lors de la conférence de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), le 4 mai dernier. Alors que d’autres journalistes soutenaient le mouvement, Khassanova était la seule présente et portait une affiche où était inscrit « Non à la censure à la télévision ouzbek ». Le 21 mai, son émission a été rayée des programmes. Le 23 mai, la direction de la chaîne a décidé de limoger la journaliste pour avoir mené une « activité destructrice contre le Président ouzbek », non sans avoir fait pression sur elle pour qu’elle démissionne en raison de la soi-disant mauvaise qualité de son travail. Suite à des pressions internationales, la journaliste a été autorisée à regagner son poste le 26 mai.