(RSF/IFEX) – Dans une lettre adressée au Premier ministre, Abderrahmane Youssoufi, RSF a déploré la « dégradation de la liberté de la presse dans le royaume ». Robert Ménard, secrétaire général de RSF, a demandé au Premier ministre de « mettre un terme aux violations de la liberté de la presse qui se sont multipliées depuis le début […]
(RSF/IFEX) – Dans une lettre adressée au Premier ministre, Abderrahmane Youssoufi, RSF a déploré la « dégradation de la liberté de la presse dans le royaume ». Robert Ménard, secrétaire général de RSF, a demandé au Premier ministre de « mettre un terme aux violations de la liberté de la presse qui se sont multipliées depuis le début de l’année. La dernière affaire en date, l’assignation à résidence des journalistes de France 3 est révélatrice de ces réflexes autoritaires que l’on croyait disparus ». RSF a rappelé que, depuis le 1er janvier 2000, sept journaux, dont deux français – « Jeune Afrique-L’intelligent » et « Le Figaro » – ont été interdits de diffusion par les autorités marocaines. « Le fait qu’un journaliste marocain ait été publiquement menacé par un ministre est également très inquiétant », a ajouté Ménard.
Selon les informations recueillies par RSF, trois journalistes de France 3 – Joseph Thual, cameraman, Jean-Marc Pitt, rédacteur et Michel Bernasconi, monteur – sont assignés à résidence, depuis le 8 octobre, à Errachidia (est du Maroc). Ils avaient couvert, la veille, le pélerinage de l’association Forum Vérité Justice au bagne de Tazmamart, situé à 60 km d’Errachidia. Le procureur du roi a affirmé détenir un mandat d’arrêt contre Thual. Il a exigé de ce dernier qu’il lui remette ses images. En juin, Thual avait déjà fait l’objet d’une étroite surveillance lors d’un reportage sur l’affaire Ben Barka (consulter l’alerte de l’IFEX du 16 juin 2000). Certaines de ses cassettes vidéo avaient été confisquées par les services de douane de l’aéroport de Rabat. A son départ, Hamidou Laânigri, le directeur général de la Direction de la surveillance du territoire (DST), avait déclaré à un journaliste marocain que Joseph Thual n’avait « pas intérêt à remettre les pieds au Maroc ».
Le 4 octobre, un autre journaliste avait également fait l’objet de ce type d’intimidation. Lors d’un briefing sur la position du Maroc sur le Sahara occidental, le ministre de l’Intérieur, Ahmed Midaoui, a menacé Aboubakr Jamaï, directeur de publication de l’hebdomadaire « Le Journal » (consulter l’alerte de l’IFEX du 5 octobre 2000). Faisant référence à un entretien de « Le Journal » avec le président du Front Polisario – ce numéro avait d’ailleurs été saisi le 15 avril – le ministre avait déclaré au journaliste : « Si vous refaites ce genre d’interview avec un membre du Front Polisario, je vous interdirai une nouvelle fois (â¦) Heureusement que vous n’êtes pas mon fils, sinon je vous aurais cassé la gueule ! »
Le 5 février, deux hebdomadaires francophones, « Le Reporter » et « Le Quotidien du Maroc/Economie » et un titre arabophone, « Al Moustaquil », ont été saisis pour avoir reproduit, partiellement ou intégralement, un mémorandum du Cheikh Abdeslam Yassine, le chef de la plus importante mouvance islamique du pays. Le 15 février, un numéro de « Jeune Afrique-L’Intelligent » a été interdit (consulter l’alerte de l’IFEX du 21 mars 2000). Il contenait un texte d’un intellectuel marocain résidant au Québec, Abdellah Labdaoui, qui s’interrogeait sur la capacité de Mohammed VI à mener de réelles réformes et à punir ceux qui ont violé les droits de l’homme sous le règne de son père. Le 4 mars, le quotidien français « Le Figaro » n’est pas paru dans les kiosques marocains (consulter l’alerte de l’IFEX du 21 mars 2000). Ce numéro contenait un article sur le livre du médecin personnel du roi Hassan II, François Cléret. Selon ce dernier, « le corps [de l’opposant Mehdi Ben Barka] a été (â¦) découpé en morceaux sur ordre de Hassan II et porté au Maroc dans les valises diplomatiques ». Le 15 avril, les hebdomadaires « Le Journal » et « Assahifa », tous deux imprimés en France, ont été interdits d’entrée au Maroc (consulter les alertes de l’IFEX des 20, 19 et 18 avril 2000). Dans son dernier numéro, « Le Journal » avait publié un entretien avec le président du Front Polisario, Mohammed Abdelaziz. L’hebdomadaire « Assahifa », qui n’a pas publié cette interview, a simplement payé le fait d’appartenir au même groupe que « Le Journal ».