(JED/IFEX) – Ci-dessous, un communiqué de presse de JED : Trois journaux privés suspendus pour trois mois à Kinshasa : JED dénonce une dérive totalitaire et un manque d’indépendance de l’instance de régulation Kinshasa, le 20 septembre 2005 Dans une lettre adressée, mardi 20 septembre 2005, à M. Modeste Mutinga, président de la Haute Autorité […]
(JED/IFEX) – Ci-dessous, un communiqué de presse de JED :
Trois journaux privés suspendus pour trois mois à Kinshasa : JED dénonce une dérive totalitaire et un manque d’indépendance de l’instance de régulation
Kinshasa, le 20 septembre 2005
Dans une lettre adressée, mardi 20 septembre 2005, à M. Modeste Mutinga, président de la Haute Autorité des Médias (HAM), Journaliste en Danger (JED), organisation indépendante et non partisane de défense et de promotion de la liberté de la presse et Réseau d’alertes de l’OMAC (Organisation des Médias d’Afrique Centrale), s’est dit « choquée et très préoccupée » par la décision du 19 septembre 2005 suspendant pour une durée de trois mois les journaux Pool Malebo, Le Journal et L’Ouragan, tous trois paraissant à Kinshasa. JED a estimé que « cette décision dénote d’une dérive totalitaire qui caractérise de plus en plus la HAM depuis quelques mois et d’un manque criant d’indépendance dans le chef de l’organe de régulation ».
JED a demandé à la HAM de « donner des gages de son indépendance par rapport au pouvoir et aux services de sécurité par la levée pure et simple de la décision inique de suspension des trois organes de presse concernés » ainsi que de « faire cesser la traque engagée par divers services de sécurité contre les responsables de ces médias, depuis le week end dernier, les contraignant ainsi à la clandestinité ».
En effet, dans une décision prise lundi 19 septembre 2005, la HAM reproche au journal Le Journal et à son supplément Pool Malebo d’avoir publié, sur base des sources déclarées « très introduites dans les milieux proches de la Conférence épiscopale », dans leurs éditions respectives N° 181 du 16 au 19 septembre 2005 et N°20 du 15 au 20 septembre 2005, un article faisant état d’un don de 30 millions de USD de la RDC remis au secteur éducatif de la République de Tanzanie au moment où un conflit de travail oppose en RDC le gouvernement aux syndicats du secteur de l’enseignement.
Selon la HAM « cet article contient des propos non vérifiés, des imputations dommageables rendus dans une absence totale de rigueur et dans la quête du sensationnalisme, manquements aux articles 2, 3, 6, 11 et 13 du Code d’éthique et de déontologie du journaliste en RDC ». Se basant sur le démenti publié le 16 septembre 2005 par la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) et dans lequel la CENCO déclarait n’avoir jamais reçu une lettre de la Conférence Episcopale de Tanzanie en rapport avec un don de 30 million de USD, la HAM conclu à l’inexistence d’une telle la lettre (de la CENCO) et a considéré, dès lors, cette affaire comme relevant de l’intoxication et non de l’information.
Concernant le journal L’Ouragan, la HAM lui reproche d’avoir, dans son édition N° 215 du 16 septembre 2005, en plus de l’article sur le don de 30 millions de USD, reproduit une analyse de Jeune Afrique l’Intelligent, édition du 15 mars 2003, évoquant des exactions commises en 2002 par quelques soldats du MLC, Ex-Mouvement rebelle dont Jean-Pierre Bemba est le Chef. La HAM considère que ces exactions ne sont pas directement imputables à M. Jean-Pierre Bemba et que la reproduction de cet article « ne concorde pas avec les objectifs de réconciliation et de paix assignés à la Transition par l’Accord global et Inclusif ».
Après avoir relevé des vices de forme et de fond qui ont entaché cette décision, JED voudrait attirer l’attention de la HAM sur le fait que les normes internationales (la Déclaration relative aux principes de la liberté d’expression en Afrique, adoptée par la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, ainsi que des dispositions du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques) considèrent que « le droit à la liberté d’expression s’étend au droit de détenir, recevoir et diffuser toutes sortes d’opinions, d’idées et d’informations. Il ne se réduit pas à des catégories telles que des opinions correctes, des idées saines et des informations véridiques ».
Pour illustrer ce propos, JED a cité l’exemple de la Cour Suprême de l’Ouganda qui a rendu, le 11 février 2004, un arrêt disant nulle et inconstitutionnelle la section du Code pénal portant sur le délit de « publication de fausses nouvelles », à la suite des poursuites engagées contre deux journalistes du quotidien indépendant The Monitor pour publication d’un article selon lequel un hélicoptère de l’armée aurait été abattu par l’Armée de Résistance du Seigneur dans le nord du pays.
D. M’Baya Tshimanga,
Président
Tshivis Tshivuadi,
Secrétaire general