Le journaliste Abdourahmane Diallo ne s'est pas présenté devant le juge, mais certains journalistes locaux affirment qu'il n'a jamais reçu de citation à comparaître.
(RSF/IFEX) – Reporters sans frontières exprime sa déception après qu’une peine de six mois d’emprisonnement a été prononcée contre le journaliste Abdourahmane Diallo, pour une affaire qui oppose son journal, le quotidien « Express News », à Pape Samba Mboup, ministre et chef de cabinet du président de la République, Abdoulaye Wade. Le journaliste n’a pas été arrêté.
« Cette affaire comporte deux questions distinctes, celle de savoir si le journal a commis une faute, et celle de savoir comment il doit être sanctionné. Le caractère diffamatoire des propos tenus par ‘Express News’, pris au piège d’accusations injurieuses entre adversaires politiques, ne fait pas de doute. Faut-il pour autant envoyer son directeur de publication en prison ? Cette condamnation est à la fois inadaptée, injuste, et contre-productive. Pour que ce type d’incident ne se reproduise plus, il est urgent de modifier la loi sur le régime des médias et de dépénaliser les délits de presse », a déclaré l’organisation, qui formule cette recommandation auprès des autorités sénégalaises depuis plusieurs années.
Le 26 août 2010, le tribunal correctionnel de Dakar a rendu son délibéré dans l’affaire « Express News », après deux reports, et a reconnu Abdourahmane Diallo, directeur de publication du journal, coupable de « diffamation ». Le journaliste a écopé d’une peine de deux ans d’emprisonnement, dont six mois ferme, et un mandat d’arrêt a été lancé contre lui. Quant au groupe « Express News », reconnu civilement responsable, il doit payer au chef de cabinet du chef de l’Etat, au titre de « réparation », la somme de 20 millions de francs CFA (environ 30 000 euros). Le tribunal a ordonné la publication de cette décision dans la presse locale.
Le journaliste ne s’est pas présenté devant le juge, mais certains journalistes locaux affirment qu’il n’a jamais reçu de citation à comparaître. L’avocat d' »Express News » souhaite faire opposition puisque le jugement a été rendu par défaut, en l’absence des accusés.
Dans son édition du 23 juin dernier, « Express News » avait titré en une « Pape Samba Mboup est un mercenaire politique toujours à la solde de celui qui a les poches pleines. » Le lendemain, il titrait « M. Mboup est considéré comme un danger permanent pour le régime et il viole les secrets d’Etat », avant d’ajouter « Pape Samba Mboup est un soulard et un intrigant, il n’est pas crédible ». Le journal relayait ainsi les propos d’un groupe de jeunes issus de son propre parti, mais favorables à son adversaire, Farba Senghor.