(JED/IFEX) – Ci-dessous, une lettre de JED au chef de la MONUC, datée du 8 juillet 2003 : Kinshasa, le 8 juillet 2003 A Monsieur l’ambassadeur William Lacy Swing Chef de la Mission des observateurs des Nations Unies En République démocratique du Congo (MONUC) A KINSHASA/GOMBE.- Monsieur l’ambassadeur, Concerne : Disparition à Bunia d’un interprète […]
(JED/IFEX) – Ci-dessous, une lettre de JED au chef de la MONUC, datée du 8 juillet 2003 :
Kinshasa, le 8 juillet 2003
A Monsieur l’ambassadeur William Lacy Swing
Chef de la Mission des observateurs des Nations Unies
En République démocratique du Congo (MONUC)
A KINSHASA/GOMBE.-
Monsieur l’ambassadeur,
Concerne : Disparition à Bunia d’un interprète de presse
Journaliste en danger (JED), organisation non gouvernementale de défense et de promotion de la liberté de la presse et Réseau d’alerte de l’Organisation des médias d’Afrique centrale (OMAC) basée à Kinshasa, a appris, par diverses sources, la disparition à Bunia dans le Nord-est de la RDC, de M. Akité Kisembo, 28 ans, interprète de l’envoyé spécial de l’AFP (Agence France Presse) à Bunia, territoire sous contrôle de la Force multinationale de l’Union Européenne sous commandement français et agissant avec un mandat des Nations Unies.
Selon divers témoignages, M. Akité Kisembo a été enlevé par un groupe de miliciens pendant qu’il interviewait des populations civiles pour le compte de l’envoyé spécial de l’AFP qui l’avait recruté localement. A ce titre, Kisembo est considéré comme un collaborateur de la presse qui a été enlevé à cause du travail qu’il faisait. A en croire le quotidien Le Potentiel N° 2869 du 8 juillet 2003, le mercredi 2 juillet 2003, Kisembo assistait, en compagnie d’autres journalistes de la presse étrangère, à l’évacuation, par la Force multinationale, du quartier général de la milice UPC (Union des patriotes congolais) de M. Thomas Lubanga, un des seigneurs de la guerre à Bunia. Les miliciens de l’UPC, selon des témoins cités par le quotidien, auraient proféré des menaces contre Kisembo le traitant de « collabo ».
C’est le lendemain de cette opération que Kisembo n’a plus donné signe de vie. Des témoignages de l’AFP, cités par Le Potentiel, affirment que Kisembo a été enlevé et assassiné par les hommes de Thomas Lubanga. Toujours selon Le Potentiel, Thomas Lubanga a été interrogé à ce sujet par des journalistes. Il a nié l’implication de ses hommes dans cette affaire mais a présenté à ses interlocuteurs un « témoin oculaire » qui aurait assisté à cette tragédie. Selon ce « témoin », le collaborateur de presse aurait été kidnappé avec six autres personnes par des miliciens d’un groupe rival Lendu qui les auraient abattus peu de temps après.
Des sources indépendantes à Bunia rejettent la version des faits telle que présentée par M. Thomas Lubanga. Ces sources affirment que les kidnappeurs et assassins de Kisembo et ses compagnons d’infortune étaient bel et bien des hommes de l’UPC qui considéraient que la collaboration offerte par Kisembo aux médias étrangers en général et à l’AFP en particulier était un acte de trahison qui méritait un « châtiment exemplaire ».
De part son travail quotidien pour compte de l’AFP, Kisembo répond à la définition d’un auxiliaire de la presse et peut, à juste titre, être considéré comme une victime de plus des ennemis de la liberté de la presse. Par conséquent, JED considère que ce meurtre prémédité est une violation grave de la liberté de la presse et ne peut rester impuni.
A l’étape actuelle des informations obtenues sur cette affaire, JED considère que M. Thomas Lubanga, chef de la milice UPC est responsable, au moins indirectement, de l’assassinat de ce collaborateur de presse. Eu égard à ce qui précède, JED demande ce qui suit :
– La constitution et l’envoie à Bunia d’une mission d’enquête internationale pour tirer au clair les circonstances de l’enlèvement et de l’assassinat de Akité Kisembo et en établir les responsabilités ;
– La traduction des commanditaires et des exécutants de l’assassinat de Kisembo devant la Cour pénale internationale.
Veuillez agréer, Monsieur l’ambassadeur, nos salutations distinguées.
Tshivis T. Tshivuadi
Secrétaire général
D. M’Baya Tshimanga
Président