(RSF/IFEX) – Quatre miliciens aux ordres de l’homme d’affaires et dirigeant politique Abdinur Ahmed Darman ont gravement menacé et brutalisé un journaliste somalien, à l’entrée d’un camp de réfugiés de Mogadiscio, dans la matinée du 16 octobre 2004, sous les yeux d’une de ses consoeurs. « Reporters sans frontières, une fois de plus, s’insurge contre le […]
(RSF/IFEX) – Quatre miliciens aux ordres de l’homme d’affaires et dirigeant politique Abdinur Ahmed Darman ont gravement menacé et brutalisé un journaliste somalien, à l’entrée d’un camp de réfugiés de Mogadiscio, dans la matinée du 16 octobre 2004, sous les yeux d’une de ses consoeurs.
« Reporters sans frontières, une fois de plus, s’insurge contre le règne de la terreur qu’entretiennent les chefs de factions en Somalie, en toute impunité. Le businessman et dirigeant du parti de la République de Somalie unie (USRP), Abdinur Ahmed Darman, devrait respecter le travail des journalistes somaliens, dont le courage honore ce pays dévasté par treize ans d’anarchie et de guerre. La façon dont ses hommes de main ont brutalisé et menacé un journaliste augure mal de ses intentions pour la Somalie », a déclaré l’organisation.
Autoproclamé président de la Somalie en juillet 2003 devant 5 000 partisans réunis à Mogadiscio, Darman et sa milice privée exercent un pouvoir sans partage sur certains quartiers de la capitale et une partie du sud du pays. Homme d’argent plus que chef de guerre, Darman, qui à son retour d’exil en 2003 affirmait être un « facilitateur d’affaires », a été accusé, dans un rapport des Nations unies, d’être impliqué dans l’impression de fausse monnaie. Il est l’un des derniers chefs claniques à refuser de reconnaître l’autorité du président Abdullahi Yusuf, qui a prêté serment devant le nouveau parlement somalien réuni au Kenya, le 14 octobre.
Abdullahi Yassin Jama, journaliste de Radio Banadir, et Zeynab Abukar Mohammed, journaliste de HornAfrik Radio, recueillaient le témoignage de civils réfugiés au « Camp Bosnia », dans la capitale somalienne, après que leurs maisons avaient été dévastées par des pluies torrentielles. « A la fin de notre reportage, a raconté Jama, quatre hommes armés se sont plantés à l’entrée du camp et m’ont interpellé. Ils m’ont dit : « Montre-nous ton magnétophone et ton enregistrement, et si nous entendons un seul mot sur le gouvernement d’Abdullahi Yusuf, tu perdras la vie » ». Lorsque sa consoeur Mohammed a vu qu’il avait été interpellé par les quatre miliciens, elle s’est cachée derrière un kiosque.
Selon le récit que Jama a fait au Somali Journalist Network (Sojon), un observatoire somalien de la liberté de la presse, un des miliciens aurait alors placé le canon de son arme sur sa tête, après l’avoir plusieurs fois giflé. Alors que, dans son enregistrement, une femme déclarait qu’elle espérait que le « gouvernement somalien au Kenya » lui accorderait « un nouveau logement », le journaliste s’est enfui en courant, essuyant les tirs de Kalachnikov des miliciens de Darman. De son côté, Mohammed a attendu le départ des miliciens pour quitter le camp de réfugiés et rejoindre sa rédaction. Tous deux sont aujourd’hui en sécurité.
Face à cette brutalité et à l’impunité dont jouissent les hommes en armes en Somalie, RSF réitère son appel aux parlementaires et au nouveau Président à ne pas gâcher l’opportunité qui s’offre à eux. « Puisqu’il s’agit de reconstruire le pays, il ne faut pas le faire au détriment de journalistes qui, en dépit de la violence permanente, continuent de faire leur travail, a conclu l’organisation. La presse somalienne doit être non seulement protégée, mais également soutenue et écoutée par ceux qui ont la charge de créer une nouvelle Somalie ».