Bülent Şık a été reconnu coupable d’avoir “rendu publiques des informations relevant du secret professionnel” pour une série d’articles parus dans le quotidien "Cumhuriyet" en avril 2018.
Cet article a été initialement publié sur rsf.org le 27 septembre 2019.
Reporters sans frontières (RSF) dénonce fermement la condamnation du lanceur d’alerte turc Bülent Şık à 15 mois de prison pour avoir révélé des informations scientifiques touchant à la santé publique.
Quinze mois de prison ferme : c’est le verdict rendu le 26 septembre à l’encontre de Bülent Şık par un tribunal d’Istanbul. Le chercheur a été reconnu coupable d’avoir “rendu publiques des informations relevant du secret professionnel” pour une série d’articles parus dans le quotidien Cumhuriyet en avril 2018. Il y révélait les résultats d’une étude scientifique à laquelle il avait participé sous l’égide du ministère de la Santé, faisant état de niveaux de pollution inquiétants et potentiellement cancérigènes de l’eau et des produits agricoles dans différentes localités turques.
Notant que les autorités n’avaient pris aucune mesure à ce sujet, Bülent Şık a justifié cette publication par un sentiment de responsabilité à l’égard des générations futures. “Ces informations scientifiques concernent la santé publique : ne pas les publier aurait été un crime, non l’inverse”, a résumé son avocat Tora Pekin lors de la dernière audience. Une attitude que le tribunal a prise comme une “absence de remords” justifiant la prison ferme. Le chercheur reste libre en attendant son procès en appel.
“Il était dans l’intérêt général que Bülent Şık rende ces informations publiques, souligne le représentant de RSF en Turquie, Erol Önderoğlu, qui assistait à l’énoncé du verdict. Sa condamnation est un acte de censure profondément injuste. Nous réclamons son acquittement en appel et l’adoption d’un cadre législatif conforme aux recommandations du Conseil de l’Europe en matière de protection des lanceurs d’alerte.”
Connu pour son expertise en matière de sécurité alimentaire, Bülent Şık collabore régulièrement avec différents médias. Comme des centaines d’autres universitaires, il a été licencié par décret de son poste à l’université Akdeniz en novembre 2016 pour avoir signé une pétition pacifiste.
La Turquie occupe la 157e place sur 180 pays au Classement mondial 2019 de la liberté de la presse établi par RSF. Sur fond de démantèlement de l’état de droit, la situation des médias est devenue particulièrement critique depuis la tentative de putsch de juillet 2016.