Le gouvernement vietnamien devrait mettre fin à la répression contre les blogueurs, les défenseurs des droits humains et les militants, et libérer immédiatement les personnes détenues simplement pour avoir exercé leurs droits civils et politiques fondamentaux.
Cet article a été initialement publié sur hrw.org le 5 mars 2024.
La répression s’intensifie, alors même que ce pays se porte candidat à un nouveau mandat au Conseil des droits de l’homme de l’ONU
Les autorités vietnamiennes ont arrêté trois éminents détracteurs du gouvernement quelques jours seulement après que le Vietnam a annoncé sa candidature à un nouveau mandat au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui. La police a arrêté Nguyen Chi Tuyen et Nguyen Vu Binh le 29 février 2024, puis Hoang Viet Khanh le 1er mars, et les a accusés de propagande contre l’État.
Le gouvernement vietnamien devrait mettre fin à la répression contre les blogueurs, les défenseurs des droits humains et les militants, et libérer immédiatement les personnes détenues simplement pour avoir exercé leurs droits civils et politiques fondamentaux. En 2022, l’Assemblée générale des Nations Unies, à l’issue d’un vote, a octroyé au Vietnam un mandat de trois ans au Conseil des droits de l’homme à Genève. Le 26 février, le Vietnam a annoncé son intention de briguer un nouveau mandat suite à l’échéance de l’actuel mandat, en 2025.
« Le gouvernement vietnamien prétend respecter les droits humains afin de prolonger la validité de son siège au Conseil des droits de l’homme de l’ONU, mais son écrasement brutal de la dissidence envoie le message inverse », a déclaré Phil Robertson, directeur adjoint de la division Asie à Human Rights Watch. « En dépit du traitement abusif des défenseurs des droits par le Vietnam, les donateurs et les partenaires commerciaux de ce pays n’ont presque rien fait pour faire pression sur le gouvernement au sujet de ces abus. »
Au moins 163 prisonniers politiques sont actuellement détenus au Vietnam, a déclaré Human Rights Watch. Au cours des seuls deux premiers mois de 2024, trois militants – Danh Minh Quang, Nay Y Blang et Phan Van Loc – ont été reconnus coupables et condamnés à des peines comprises entre trois ans et demi, et sept ans de prison. Au moins 24 autres personnes sont en garde à vue pour des raisons politiques, et attendent d’être jugées.
La police a arrêté Nguyen Chi Tuyen (également connu sous le nom d’Anh Chi), 49 ans, le 29 février à Hanoï. Ce militant des droits humains utilise les médias sociaux, notamment YouTube et Facebook, pour commenter des questions sociales et politiques. Sa chaîne YouTube principale, Anh Chi Rau Den, a produit plus de 1 600 vidéos et est suivie par 98 000 abonnés. Sa deuxième chaîne YouTube, AC Media, a produit plus de 1 000 vidéos et compte près de 60 000 abonnés.
Le 29 février, la police a également arrêté Nguyen Vu Binh, 55 ans, ancien prisonnier politique, à Hanoï. Après avoir travaillé pendant près de dix ans comme journaliste au journal officiel du Parti communiste vietnamien, la Revue communiste (Tap Chi Cong San), il a démissionné en décembre 2000 et a tenté de former un parti politique indépendant. Il était également l’un des nombreux dissidents qui avaient tenté de former une association anti-corruption en 2001. La police l’a arrêté en septembre 2002, alléguant qu’il avait calomnié l’État vietnamien dans un témoignage écrit qu’il avait fourni au Congrès américain en juillet 2002 au sujet de violations des droits humains au Vietnam. Le gouvernement l’a également pris pour cible pour ses critiques à l’égard d’un traité frontalier controversé avec la Chine dans un article diffusé en ligne en août 2002.
Le 1er mars, la police a arrêté Hoang Viet Khanh, 41 ans, dans la province de Lam Dong, dans la région des Hauts Plateaux du Centre. Il a commencé à utiliser Facebook pour exprimer ses opinions sur diverses questions sociopolitiques au Vietnam en 2018. Il a dénoncé les brutalités policières et fait part de ses inquiétudes concernant les aveux extorqués sous la torture lors de la garde à vue. Il a publiquement exprimé son soutien aux prisonniers politiques, notamment Pham Chi Dung, Nguyen Tuong Thuy, Le Huu Minh Tuan, Le Chi Thanh, Le Trong Hung et Le Van Dung.
Lorsque le Premier ministre Pham Minh Chinh a pris ses fonctions pour la première fois en 2021, Hoang Viet Khanh a publié un commentaire exhortant le Premier ministre à envisager d’abolir l’article 4 de la Constitution vietnamienne, qui confirme le leadership du Parti communiste sur le pays.