Le 21 septembre, Sergueï Naoumov a tout juste eu le temps d’appeler un collègue pour le prévenir qu’il avait été arrêté. Il n’a pu donner aucune précision sur le lieu où il se trouvait.
Reporters sans frontières fait part de sa profonde inquiétude quant au sort du journaliste indépendant Sergueï Naoumov, dont on est sans nouvelles depuis son interpellation, dans la soirée du 21 septembre 2013. L’organisation appelle instamment les autorités à expliquer les raisons et le lieu de sa détention.
« Nous sommes d’autant plus préoccupés que les investigations hautement sensibles de Sergueï Naoumov, dans un environnement aussi répressif que l’Ouzbékistan, sont susceptibles de lui valoir les pires représailles. Son interpellation pourrait être la traduction en acte des nombreux avertissements qu’il a reçus, lui enjoignant de mettre un terme à ses activités sous peine de sérieuses conséquences. S’il devait se confirmer qu‘il est accusé de ‘vol’, nul doute qu’il s’agirait là d’un énième montage contre un journaliste indépendant, comme les autorités y ont régulièrement recours », a déclaré Reporters sans frontières.
Le 21 septembre vers 18 heures, Sergueï Naoumov a tout juste eu le temps d’appeler un collègue pour le prévenir qu’il avait été arrêté. Il n’a pu donner aucune précision sur le lieu où il se trouvait ni les raisons de son arrestation. D’après l’agence de presse Ferghana, il aurait été interpellé chez lui, à Ourguentch (province de Khorezm, à l’ouest du pays), une heure plus tôt. Les amis du journaliste ont interrogé tous les commissariats de la ville, le parquet et le Service de sécurité nationale (SNB), mais ils n’ont pu retrouver sa trace nulle part. D’après des témoignages qui n’ont pas encore été confirmés officiellement, Sergueï Naoumov serait accusé d’avoir arraché une chaîne en or à une femme, à la gare d’Ourguentch.
Le journaliste est reconnu pour ses investigations sans relâche sur des sujets extrêmement sensibles, dont le travail forcé dans les champs de coton et les problèmes écologiques de la région. Il collabore depuis de longues années avec l’agence de presse centrasiatique indépendante Ferghana, l’Institute for War and Peace Reporting (IWPR), le journal Sécurité écologique et initiative citoyenne et le magazine russe Politjurnal. Lauréat de plusieurs prix professionnels, il collabore également avec des organisations de défense des droits de l’homme et a pris part à plusieurs projets visant à développer le journalisme indépendant.
Ces activités ont fait de Sergueï Naoumov la cible du harcèlement des autorités. D’après IWPR, il avait déjà été interpellé fin août et interrogé sur ses activités. D’après la défenseure des droits de l’homme en exil Nadejda Ataeva, il recevait des menaces anonymes par téléphone et sur Internet.
« Sergueï Naoumov a collaboré avec notre publication en diverses occasions, a déclaré à Reporters sans frontières le rédacteur en chef de Ferghana, Daniil Kislov. Nous le connaissons comme un journaliste honnête et intègre, un homme très respectable. Je pense que ses ennuis peuvent être précisément liés à son activité professionnelle. »
IWPR souligne que le journaliste enquêtait sur la récolte du coton, débutée le 16 septembre. L’organisation émet l’hypothèse que les autorités locales aient pu vouloir « isoler » ceux qui possédaient des informations crédibles à ce sujet, alors qu’une commission officielle a récemment été dépêchée de Tachkent (capitale) pour rendre compte de la situation.
L’Ouzbékistan figure à la 164e place sur 179 dans le classement mondial 2013 de la liberté de la presse, réalisé par Reporters sans frontières. Au moins neuf journalistes croupissent dans les geôles ouzbèkes du fait d’accusations montées de toutes pièces. Reporters sans frontières a récemment reçu des informations alarmantes sur l‘état de santé de Solidjon Abdourakhmanov, condamné en 2008 à dix ans de réclusion criminelle pour « trafic de drogue ».