Index on Censorship, le magazine trimestriel de la liberté d’expression, consacre son dernier numéro aux États-Unis, pays où la liberté de parole est considérée comme sacrée et où pourtant elle semble désormais « importune ou antipatriotique » dans le sillage du 11 septembre. Intitulé « Rewriting America » [réécrire les États-Unis], le document se penche […]
Index on Censorship, le magazine trimestriel de la liberté d’expression, consacre son dernier numéro aux États-Unis, pays où la liberté de parole est considérée comme sacrée et où pourtant elle semble désormais « importune ou antipatriotique » dans le sillage du 11 septembre.
Intitulé « Rewriting America » [réécrire les États-Unis], le document se penche sur le pays le plus puissant du monde dans les mots d’Américains aux limites de la libre expression.
Dans un texte intitulé « The Trials of Liberty » [les épreuves de la liberté], Michael McClintock, du Comité des avocats pour les droits de l’homme (Lawyers Committee for Human Rights, LCHR), écrit que depuis le 11 septembre, à peu près chaque aspect de la protection des droits de la personne aux États-Unis est remis en question. Le « Patriot Act » a été expédié au Congrès et promulgué le 26 octobre 2001 pratiquement sans le moindre débat public, fait remarquer McClintock. La Loi accorde à la police des pouvoirs plus étendus pour espionner les particuliers et amasser des renseignements sur eux, tout en créant de nouveaux crimes et des peines rigoureuses.
La liberté d’accès à l’information a encore subi un recul cette semaine lorsque le procureur général John Ashcroft a ordonné aux agences du gouvernement de ne tenir aucun compte du Freedom of Information Act [loi sur l’accès à l’Information], ce qui fait retomber le fardeau sur les citoyens qui doivent d’abord prouver qu’ils ont le droit d’accéder aux dossiers du gouvernement, dit McClintock.
Entre autres tentatives plus récentes pour étendre les pouvoirs de la police, l’administration Bush a énoncé en mai 2003 une proposition en vertu de laquelle serait étendu le pouvoir d’accès du gouvernement aux renseignements personnels. Aux termes de cette proposition, poursuit McClintock, la Central Intelligence Agency et l’armée seraient autorisées, sans ordonnance d’un tribunal, à forcer les fournisseurs de services Internet, les compagnies de cartes de crédit, les bibliothèques et autres organisations à divulguer les dossiers téléphoniques, les opérations bancaires et les courriels.
Dans un document intitulé « Clear and Present Danger » [danger réel et immédiat], Jim D’Entremont, de la Coalition de Boston pour la liberté d’expression (Boston Coalition for Freedom of Expression), traite de la tendance croissante à censurer la musique tandis que s’accentue la concentration de la propriété des médias. Alors que des centaines stations de radio et de télévision, de compagnies de disques et de salles de spectacles, autrefois indépendantes, se trouvent maintenant entre les mains de géants tels que AOL Time Warner, Viacom et News Corporation, les musiciens subissent davantage de pressions pour être prudents et éviter tout contenu controversé.
« Dans les conseils d’administration des conglomérats de communications et des chaînes de vente au détail, les limites imposées à l’expression naissent de la crainte que des propos, des métaphores ou des thèmes controversés puissent ternir le blason de l’entreprise ou lui faire perdre de l’argent », dit D’Entremont.
Par exemple, après le 11 septembre, le groupe Clear Channel Communications, qui possède 1 225 stations de radio et 39 stations de télévision aux États-Unis, a fait parvenir une note de service à ses stations de radio pour leur suggérer de « retirer » au moins 150 chansons dont le contenu pouvait sembler anti-américain.
Parmi les autres articles de ce numéro de Index on Censorship, on compte des reportages sur les restrictions du gouvernement américain à la liberté de parole dans l’Irak d’après Saddam, la couverture, par les médias américains, de la guerre en Irak et la liberté d’expression sur les campus universitaires.
Lire les articles en ligne à : http://www.indexonline.org/
Par ailleurs, le groupe Cartoonists Rights International (CRN) fait remarquer que, pour les caricaturistes des États-Unis, l’atmosphère a changé de manière radicale depuis le 11 septembre et l’entrée en vigueur du Patriot Act. « Il y a moins de tolérance, davantage de paranoïa et un réflexe conservateur en réponse à toute réflexion critique dans les médias susceptible d’être perçue comme antipatriotique ou anti-américaine ».
Un incident a impliqué récemment, le 20 juillet, une caricature de Mike Ramirez, du « Los Angeles Times », où celui-ci montrait le président George W. Bush, un revolver pointé sur la tempe. Alors qu’elle voulait décrire Bush comme victime de ses adversaires politiques qui s’en prennent à lui pour avoir déclenché la guerre en Irak, la caricature a poussé des agents des services secrets américains à demander une entrevue avec Ramirez, rapporte le CRN.
Pour voir la caricature : http://www.cartoon-crn.com/news.htm
Consulter les sites suivants :
– Reporters Committee for Freedom of the Press : http://www.rcfp.org/
– American Civil Liberties Union : http://www.aclu.org/SafeandFree/SafeandFree.cfm?ID=12126&c=207
– Fairness and Accuracy in Reporting : http://www.fair.org/
– Open Democracy : http://www.opendemocracy.net/debates/issue-3-98.jsp