Dix groupes membres de l’Échange international de la liberté d’expression (IFEX), sous la direction de la Fondation de la presse du Pakistan (PPF) pressent le Président Pervez Moucharraf de révoquer tous les ordres qui entravent la liberté des médias au Pakistan depuis la suspension en mars du juge en chef de la Cour suprême. Depuis […]
Dix groupes membres de l’Échange international de la liberté d’expression (IFEX), sous la direction de la Fondation de la presse du Pakistan (PPF) pressent le Président Pervez Moucharraf de révoquer tous les ordres qui entravent la liberté des médias au Pakistan depuis la suspension en mars du juge en chef de la Cour suprême.
Depuis le congédiement arbitraire le 9 mars dernier du juge en chef de la Cour suprême Iftikhar Mohammed Chaudhry par Moucharraf, les autorités harcèlent, menacent et même attaquent violemment les médias pakistanais qui couvrent les manifestations antigouvernementales de protestation et la campagne non violente menée pour rétablir Chaudhry dans ses fonctions, indiquent les groupes membres de l’IFEX dans une lettre à Moucharraf.
Dans cette lettre conjointe, les membres de l’IFEX expriment leur soulagement qu’après les manifestations qui se sont déroulées dans tout le pays, le président ait suspendu un décret controversé qui habilitait l’Autorité de réglementation des médias électroniques du Pakistan (Pakistan Electronic Media Regulation Authority, PEMRA) entre autres mesures, à faire cesser les émissions radiodiffusées, à saisir l’équipement et à multiplier par dix les amendes pour les contrevenants. Mais ce n’était qu’une concession (même pas permanente) au milieu d’une série d’attaques systématiques menées contre la presse par le gouvernement depuis la suspension du juge en chef.
Encore récemment, le 2 juin, la PEMRA a interdit aux chaînes de télévision indépendantes de radiodiffuser des émissions sur la crise judiciaire. Un ministre du gouvernement avait déjà déclaré que la couverture pourrait affecter l’investissement étranger direct dans le pays et nuire aux institutions de la nation. C’est pourquoi les 3 et 4 juin, deux importantes chaînes de télévision, « Geo TV » et « Aaj TV », ont été réduites au silence par les exploitants de la retransmission par câble, sur les ordres du gouvernement et ont donc été absentes dans de grandes parties du pays.
Le 12 mai, l’un des jours les plus sombres de l’histoire du pays après le congédiement de Chaudhry, 42 personnes ont perdu la vie de manière violente lorsque des partisans du gouvernement se sont battus avec des militants de l’opposition pour empêcher Chaudhry d’entrer à Karachi. Entre-temps, des groupes armés ouvraient le feu sur Aaj TV, qui couvrait les affrontements, et mettaient le feu à plus d’une dizaine de véhicules dans le stationnement. Selon la Fédération internationale des journalistes (FIJ), au moins six journalistes et travailleurs des médias ont été blessés. Les forces de sécurité sont restées passives, refusant d’intervenir, même si la chaîne de télévision transmettait en direct l’assaut contre ses propres installations et en dépit d’appels répétés pour être protégée.
Des pressions judiciaires ont aussi été exercées contre des chaînes indépendantes de médias. Le 22 avril, la PEMRA a accusé « Aaj TV » d’incitation à la violence par sa couverture de l’affaire Chaudhry pendant que celle-ci était entendue devant le Conseil judiciaire suprême.
Certains journalistes en particulier sont ciblés et harcelés parce qu’ils ont couvert le congédiement de Chaudhry. Selon la PPF, le 22 mai, le Conseil Mohajir Rabita (Mohajir Rabita Council, MRC), un allié du parti de Moucharraf, a émis une liste de 12 populaires journalistes pakistanais à abattre, qu’il qualifie de « chauvins » et d’« ennemis ». Une semaine plus tard, trois journalistes, dont deux figuraient sur la liste trouvaient dans leur voiture une enveloppe identique, chacune contenant un balle de 30mm. La PPF rapportait également en mai que Shakeel Turabi, rédacteur en chef d’une agence de nouvelles locale, a été brutalement tabassé parce que son agence avait rapporté que certains individus qui avaient agressé Chaudhry appartenaient aux services de renseignement et non à la police, comme l’avait prétendu le gouvernement.
Ces mesures « illustrent la détérioration alarmante de l’environnement de la liberté d’expression au Pakistan », déclarent les membres de l’IFEX. « Elles soulèvent en outre de graves doutes quant à l’engagement réitéré de votre gouvernement de respecter la liberté d’expression. »
Reporters sans frontières (RSF) continue de documenter l’érosion constante de la liberté de la presse sous Moucharraf. En octobre 2002, le Pakistan se classait au 119e rang sur les 166 pays qui figurent à l’Index de la liberté de la presse de RSF. Dès décembre 2006, le Pakistan avait glissé au 157e rang.
La FIJ demande aux organisations de défense des médias dans le monde de participer le 15 juin à une Journée internationale d’action, pour protester devant leur ambassade locale du Pakistan et attirer l’attention sur la dégradation de la liberté de la presse et de la sécurité des journalistes.
La FIJ et son organisation affiliée, la Fédération des journalistes du Népal (FNJ), appellent aussi à la solidarité avec les journalistes du Pakistan « les plus vulnérables », – ceux qui travaillent dans les zones tribales. Le 17 juin, Noor Ahmed Solangi, reporter au quotidien en langue sindh Khabroon, était abattu par deux inconnus à Pirjo Goth, à l’intérieur du Sindh. Le 2 juin, Noor Hakim Khan, reporter du quotidien « Daily Pakistan » et vice-président du Syndicat tribal des journalistes (Tribal Union of Journalists), était l’un des cinq hommes qui ont perdu la vie lorsqu’une bombe a explosé contre leur véhicule dans le nord-ouest de la région de Bajaur, près de la frontière du Pakistan avec l’Afghanistan.
Consulter les sites suivants :
– Action conjoint de l’IFEX : http://tinyurl.com/3xf2bb
– Alertes de la PPF : http://tinyurl.com/2q8kc6
– Rapport capsule de Human Rights Watch : http://tinyurl.com/3y779f
– FIJ, à propos du 12 mai : http://tinyurl.com/34anv3
– FIJ, à propos de la Journée internationale d’action : http://tinyurl.com/3dulmh
– FIJ, à propos de Hakim : http://tinyurl.com/2lvcau
– FIJ, à propos de Solangi : http://tinyurl.com/38rt43
– Mémorandum de la FNJ à Moucharraf : http://tinyurl.com/2jpq8q
– Indice de la liberté de la presse de RSF : http://tinyurl.com/wry7t
(Photo : Président Pervez Moucharraf. Photo courtoisie de www.pakistaniat.com)
(19 juin 2007)