Les lois d’urgence en vigueur depuis mars au Bangladesh continuent de susciter une atmosphère favorable au harcèlement et à la violence – y compris pour les journalistes du pays, disent Human Rights Watch, le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), la Fédération internationale des journalistes (FIJ) et Reporters sans frontières (RSF). Dans certains districts, […]
Les lois d’urgence en vigueur depuis mars au Bangladesh continuent de susciter une atmosphère favorable au harcèlement et à la violence – y compris pour les journalistes du pays, disent Human Rights Watch, le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), la Fédération internationale des journalistes (FIJ) et Reporters sans frontières (RSF).
Dans certains districts, l’armée a convoqué les journalistes et les a photographiés, « ce qui constitue une tentative flagrante d’intimidation », dit Human Rights Watch. Les journalistes des médias imprimés et électroniques reçoivent aussi des appels téléphoniques de responsables du renseignement militaire qui les avertissent de ne rien publier de critique sur les forces de sécurité.
Ces avertissements ont suscité un vaste réflexe d’autocensure, en particulier chez les médias électroniques, disent les membres de l’IFEX.
« La crise politique ne fera que s’exacerber à cause des efforts déployés pour supprimer les nouvelles et l’opinion », dit le CPJ. « Ce gouvernement ne doit pas abuser des pouvoirs extraordinaires dont il jouit en vertu de l’état d’urgence pour tenir le public dans l’ignorance. »
Selon Human Rights Watch et RSF, le gouvernement provisoire a retiré des ondes la seule chaîne privée de nouvelles continues du pays parce qu’elle aurait fonctionné avec un faux permis de radiodiffusion. Cette décision, prise le 6 septembre, est survenue quelques jours après que le gouvernement eut prévenu la chaîne de ne pas diffuser de séquences des récentes émeutes antigouvernementales. Une autre chaîne privée, « Ekushey Television », a elle aussi été avertie par écrit de ne pas diffuser de nouvelles « provocatrices ».
Avant même que le magazine pût être distribué, dit Human Rights Watch, les censeurs du gouvernement ont également retiré récemment deux articles de la revue « The Economist » qui faisaient mention de protestations et de politique bangladaise.
La répression croissante contre les médias fait suite à l’imposition, à la fin août, du couvre-feu dans la capitale, Dacca, et dans cinq autres villes où se sont produits de violents affrontements entre la police et les étudiants qui appelaient à la fin du régime de la loi d’urgence.
Bien que des responsables aient fourni l’assurance que les médias pourraient fonctionner librement pendant les heures du couvre-feu, les journalistes n’ayant besoin que de leur identification de presse, des dizaines de journalistes ont été agressés et détenus par les membres des forces de sécurité tandis qu’ils travaillaient, indiquent le CPJ et des dépêches locales. Le quotidien « Samakal » a rapporté que quatorze de ses journalistes avaient été tabassés par les forces de sécurité.
Pendant le couvre-feu, le conseiller en droit et en information, Mainul Hosein, a rappelé aux journalistes que le régime d’urgence était en vigueur et il les a priés de « jouer un rôle responsable ». Selon la BBC, Hosein aurait déclaré : « Nous demandons aux chaînes de cesser jusqu’à nouvel ordre de diffuser des scènes de violence, parce que cela pourrait provoquer davantage de violence. » Les chaînes de télévision privées au Bangladesh ont cessé abruptement de retransmettre des reportages sur les manifestations de rue, suspendant même les populaires émissions de discussion des nouvelles politiques du jour.
« Lorsqu’un haut fonctionnaire du gouvernement commence à dire aux médias ce qu’ils peuvent et ne peuvent pas publier ou radiodiffuser, le danger d’imposition de la censure est très réel », dit la FIJ.
Annoncées après que le gouvernement provisoire eut pris le pouvoir en janvier, les règles de 2007 sur les pouvoirs d’urgence, destinées à éradiquer la corruption, limitent les activités politiques et syndicales ainsi que la couverture des nouvelles politiques par les médias. Ceux qui ne se conforment pas aux restrictions risquent cinq ans de prison. En vertu de ces règles, le gouvernement peut interdire ou censurer les nouvelles imprimées et radiodiffusées sur les manifestations de protestation et autres activités politiques présumées « provocatrices ou nuisibles ». Le gouvernement peut en outre saisir le matériel imprimé et confisquer les imprimeries et l’équipement de radiodiffusion.
D’après Human Rights Watch, des dizaines de milliers de personnes ont été arrêtées en vertu de l’état d’urgence sans supervision judiciaire appropriée. Un grand nombre de délits ont été rendus inadmissibles à la libération sous caution – les détenus risquent la détention indéfinie sans procès.
Bien que le gouvernement de transition ait décidé le 10 septembre de lever en partie l’interdit qui pèse sur les activités politiques – permettant de discuter de politique « à la maison » à Dacca, afin de permettre aux partis politiques d’échanger sur les réformes électorales avec la Commission électorale – cela est loin de suffire pour s’attaquer aux restrictions importantes des libertés fondamentales et aux violations généralisées des droits de la personne dans le pays, dit Human Rights Watch. L’interdit de toute réunion politique reste en vigueur.
Consulter les sites suivants :
– Human Rights Watch : http://tinyurl.com/2ttg7b
– Page sur le Bangladesh de Human Rights Watch : http://tinyurl.com/37v777
– CPJ : http://www.cpj.org/news/2007/asia/bangla23aug07na.html
– FIJ : http://www.ifj.org/default.asp?index=5245&Language=EN
– RSF, à propos de la fermeture d’une station de nouvelles privée : http://tinyurl.com/2tetpr
– RSF, à propos du couvre-feu : http://tinyurl.com/38fhul
(Photo : Des étudiants détruisent une voiture près de l’Université de Dacca au cours d’une manifestation de protestation pour exiger la fin de l’état d’urgence – août 2007. Photo courtoisie de e-Bangladesh.org)
(18 septembre 2007)