Il y avait de bonnes raisons de célébrer le Nouvel An chinois – trois journalistes chinois ont été libérés après avoir passé des années en prison pour des crimes bidon. Mais les fonctionnaires doivent en faire encore beaucoup plus avant remplir les engagements qu’ils avaient pris au chapitre des droits de la personne lorsqu’on leur […]
Il y avait de bonnes raisons de célébrer le Nouvel An chinois – trois journalistes chinois ont été libérés après avoir passé des années en prison pour des crimes bidon. Mais les fonctionnaires doivent en faire encore beaucoup plus avant remplir les engagements qu’ils avaient pris au chapitre des droits de la personne lorsqu’on leur a confié le mandat d’organiser les Olympiques de 2008, disent des membres de l’IFEX.
Le journaliste Li Changqing, lauréat de la Plume d’Or de la Liberté 2008, décernée par l’Association mondiale des journaux (AMJ), a été le premier libéré le 2 février, à l’expiration de sa peine de trois ans de prison pour « fabrication et propagation de fausses informations », rapporte l’AMJ.
Li, reporter et directeur adjoint des nouvelles au « Quotidien de Fuzhou » à Fuzhou, avait averti le public, avant les autorités, d’une éclosion de fièvre dengue à Fuzhou.
Trois ans plus tard, le journaliste Ching Cheong, basé à Hong Kong, a obtenu inopinément une libération conditionnelle à Guangzhou, dans le sud de la Chine. Le reporter du « Singapore Strait Times » avait purgé trois ans d’une peine de cinq ans de prison pour avoir espionné au profit de Taïwan, rapporte le Comité pour la protection des journalistes (CPJ).
Puis, Yu Huafeng, ancien directeur journal libéral « Nanfang Dushi Bao », de Guangzhou, a été libéré le 8 février après que sa peine eut été réduite pour la troisième fois, rapporte Reporters sans frontières (RSF). Yu a fini par purger quatre ans d’une peine de douze ans pour corruption, après que son journal au ton incisif eut publié un reportage sur un cas suspect de SRAS à Guangzhou.
Les raisons pour lesquelles on a libéré Ching et Yu avant terme – des années avant l’expiration prévue de leurs peines – restent obscures.
Selon le « Washington Post », la concession semble destinée à amadouer quelque peu les critiques de Hong Kong et du sud de la Chine, où des milliers de journalistes chinois s’étaient emparés de l’histoire des deux hommes. « Les journalistes de Hong Kong jouissent de plus de libertés dans les médias que leurs homologues du continent, et le journal de M. Yu sur le continent a la réputation de tenir tête aux censeurs de l’État », dit le « Post ».
Les membres de l’IFEX se sont battus très fort eux aussi pour obtenir leur remise en liberté. Ces libérations montrent que « des campagnes de soutien aux journalistes et aux cyberdissidents emprisonnés peuvent porter fruit », dit RSF.
Mais toute bienveillance inspirée par la libération de ces hommes est annulée par la répression de ces dernières semaines que mène Pékin contre la dissidence. Moins de 24 heures après que Ching fut rentré chez lui à Hong Kong, un autre journaliste et critique acerbe de la corruption gouvernementale était condamné à quatre ans de prison pour subversion, selon ce que rapportent le CPJ et le Comité des écrivains en prison du PEN International (WiPC).
Le journaliste Lu Gengsong avait écrit plusieurs articles pour des sites web hébergés outre-mer dans lesquels il se montrait critique des fonctionnaires locaux, et il avait couvert, la veille de son arrestation, le procès d’un défenseur des droits de la personne.
Son arrestation survient après celle du plus éminent militant des droits civils du pays, Hu Jia, qui se sert de blogues, de diffusions sur le web et de vidéo pour mettre à nu les violations des droits de la personne. Hu a été arrêté en décembre et aurait été inculpé d’« incitation à la subversion du pouvoir d’État », rapportent Human Rights Watch et RSF.
D’après Human Rights Watch, les condamnations pour atteintes à la sécurité de l’État ont augmenté de presque 20 pour 100 entre 2006 et 2007. « Inculper les gens d' »incitation à la subversion » est devenu l’arme de prédilection pour faire taire la dissidence à la veille des Jeux », dit Human Rights Watch. « Le seul « crime » de Hu Jia a été de parler honnêtement de l’étranglement grandissant de la dissidence à l’approche des Jeux; son arrestation lance un sévère message aux autres militants chinois : tenez-vous tranquilles pour les Olympiques ou vous en subirez les conséquences. »
L’AMJ et RSF soulignent qu’au moins 30 journalistes et 50 cyberdissidents sont toujours derrière les barreaux pour avoir fait leur travail, ce qui fait de la Chine le premier geôlier de journalistes du monde entier.
Les membres de l’IFEX accentuent leurs campagnes et pressent le gouvernement chinois de libérer tous les journalistes et prisonniers politiques avant les Jeux d’été.
Ils demandent aussi aux comités olympiques nationaux et aux dirigeants du monde d’exiger la libération des dissidents comme condition de leur participation à Pékin en août. Selon ARTICLE 19 et RSF, un journal britannique a révélé récemment que l’Association Olympique de Grande-Bretagne veut interdire aux participants britanniques de faire des commentaires sur quelque « question politiquement délicate » pendant la durée des Jeux.
« La répression ne fera que s’accroître jusqu’à l’ouverture des Jeux, à moins que les gouvernements étrangers, le Comité International Olympique et les comités olympiques nationaux fassent savoir clairement à la Chine que ces violations constituent une menace pour la réussite des Olympiques de 2008 à Pékin », souligne Human Rights Watch. « Le silence international que l’on constate devant ces violations des droits de la personne liées aux Olympiques équivaut à laisser au gouvernement chinois le champ libre pour qu’il amplifie sa répression pré-olympique. »
Pour les histoires et les alertes concernant les journalistes emprisonnés et ceux qui ont été libérés récemment, aller à :
– Page de l’IFEX consacrée à la Chine : http://tinyurl.com/24bfcf
– « Washington Post », « Un-Olympian effort » (Un effort qui n’a rien d’olympique) : http://tinyurl.com/2mw5ak
Consulter également les campagnes des membres de l’IFEX sur la Chine :
– Pétition en ligne du CPJ pour presser la Chine de libérer les journalistes emprisonnés : http://tinyurl.com/ywuzwa
– Human Rights Watch, « Beijing 2008: China’s Olympian Human Rights Challenges », avec sections spéciales sur la façon d’agir et comment participer à la discussion : http://china.hrw.org/
– Campagne du PEN sur la Chine, « We Are Ready for Freedom of Expression: Countdown to the Beijing Olympics » (Nous sommes prêts pour la libre expression : Compte à rebours jusqu’aux Olympiques de Pékin), avec biographies des 39 rédacteurs emprisonnés : http://www.pen.org/china2008
– Campagne « Pékin 2008 » de RSF : http://tinyurl.com/jx8jk
– Campagne de l’AMJ pour obtenir la libération des journalistes chinois :
http://www.wan-press.org/china/home.php
(Photo courtoisie de Reuters)
(12 février 2008)