(RSF/IFEX) – Ci-dessous, un communiqué de presse de RSF: Diffusion immédiate 23 mars 1999 COMMUNIQUÉ DE PRESSE Amérique latine : À la veille de la décision de la Chambre des Lords, Reporters sans frontières rappelle qu’une quarantaine de journalistes ont également été victimes de la junte militaire mise en place par Augusto Pinochet en 1973 […]
(RSF/IFEX) – Ci-dessous, un communiqué de presse de RSF:
Diffusion immédiate
23 mars 1999
COMMUNIQUÉ DE PRESSE
Amérique latine : À la veille de la décision de la Chambre des Lords,
Reporters sans frontières rappelle qu’une quarantaine de journalistes ont
également été victimes de la junte militaire mise en place par Augusto
Pinochet en 1973 et que l’impunité reste trop souvent la règle en Amérique
latine
Alors que la Chambre des Lords doit se prononcer, mercredi 24 mars, sur la
reconnaissance ou non d’une immunité diplomatique au Général Pinochet, dont
l’enjeu est le procès de l’ancien chef d’Etat, Reporters sans frontières
rappelle que parmi les 3 000 morts et disparus recensés entre 1973 et 1990,
on compte une quarantaine de journalistes. Plus généralement, la plupart des
assassinats de journalistes en Amérique latine au cours des trois dernières
décennies sont restés impunis à ce jour.
Dans les années 1970 et au début des années 1980, les journalistes sont
victimes des dictatures et des conflits de l’Etat avec des mouvements de
guérillas. Des journalistes sont assassinés mais certains disparaissent. Le
plus gros contingent des disparitions provient des pays du cône sud mais
également d’Amérique centrale. Ces enlèvements sont pour la plupart dûs aux
forces de l’Etat, aussi bien au Chili, qu’en Argentine ou en Uruguay. Plus
de 70 journalistes restent portés disparus aujourd’hui.
Dans les années 1980, les conflits entre l’armée et la guérilla se
poursuivent dans les pays d’Amérique centrale, en Colombie, mais apparaît
aussi dans d’autres pays, comme au Pérou. Le cas du Guatemala est
significatif: entre 1978 et 1990, vingt-cinq journalistes ont été tués dans
le conflit qui oppose l’Etat à la guérilla du FMLN (Frente Farabundo Martí
de Liberación Nacional). A côté de ces conflits armés, de nouvelles menaces
émergent depuis une quinzaine d’années: les journalistes deviennent la cible
des milices paramilitaires, des narcotrafiquants et des groupes mafieux. Ces
derniers n’hésitent pas à supprimer les témoins gênants. En Colombie et au
Mexique, où plusieurs de ces facteurs se combinent, on dénombre près de 60
journalistes tués depuis dix ans.
Loin d’appartenir au passé, l’impunité reste ainsi la règle en Amérique
latine. L’Etat n’est parfois pas prêt à assumer ses responsabilités
historiques. Au Guatemala, le gouvernement guatémaltèque vient de refuser de
créer une commission pour épurer l’armée guatémaltèque pourtant reconnue
responsable de la quasi totalité des massacres par la « Commission
d’éclaircissement historique ». Dans un rapport rendu public le 25 février
1999, cette institution, soutenue par l’ONU, a attribué aux forces armées 93
% des massacres perpétrés au cours des 36 années de conflit qu’a connu le
pays. Mais sur l’ensemble de l’Amérique latine, ce sont 134 journalistes qui
ont été tués dans cette région depuis 1988, et pratiquement aucun des
auteurs de ces meurtres n’a été punis à ce jour. La Colombie et le Mexique,
où l’on retrouve plusieurs de ces acteurs de la violence, représentent à eux
seuls près de la moitié de ce bilan. Que la police invoque le « manque de
preuves » pour cesser ses investigations ou que la justice complique les
choses à dessein confirme le sentiment qu’il existe parfois des complicités
entre les tueurs et le pouvoir.
L’impunité ne doit pas être considérée comme une fatalité. En Argentine, le
cours peut être inversé dès cette année alors que doit se tenir le procès
des auteurs présumés du meurtre du journaliste argentin José Luis Cabezas.
Bien que Reporters sans frontières craigne que l’on s’en tienne au « procès
des lampistes » après que l’enquête, clôturée le 14 décembre dernier, a
finalement écarté la thèse d’une complicité de la police de l’Etat de Buenos
Aires, l’organisation rappelle que les pressions internationales et celles
de la presse argentine avaient contribué, à ses débuts, à faire progresser
l’enquête à ses débuts alors marquée par de nombreuses fausses pistes et
faux témoignages. Le cadavre carbonisé du photographe de l’hebdomadaire
« Noticias », avait été retrouvé le 25 janvier 1997 près de la station
balnéaire de Pinamar, dans la province de Buenos Aires, une balle dans la
tête et les mains attachées dans le dos par des menottes. L’année
précédente, ce dernier avait illustré une enquête sur la corruption de
policiers. Il avait aussi été le premier à prendre Alfredo Yabrán en photo.