Des défenseurs des droits, dont trois membres de Reporters sans frontières (RSF), rendus furieux par la répression chinoise au Tibet, ont été arrêtés lundi à Olympie, en Grèce, après avoir perturbé la cérémonie d’allumage de la flamme olympique. Le secrétaire général de RSF, Robert Ménard, et deux autres membres de RSF, ont déroulé une bannière […]
Des défenseurs des droits, dont trois membres de Reporters sans frontières (RSF), rendus furieux par la répression chinoise au Tibet, ont été arrêtés lundi à Olympie, en Grèce, après avoir perturbé la cérémonie d’allumage de la flamme olympique.
Le secrétaire général de RSF, Robert Ménard, et deux autres membres de RSF, ont déroulé une bannière présentant les anneaux olympiques transformés en menottes et ont appelé au boycottage de la cérémonie d’ouverture des Jeux de Pékin, en août.
L’incident s’est produit au moment où Liu Qi, président du Comité organisateur des Jeux de Pékin, s’adressait à des milliers de dignitaires, d’officiels du mouvement olympique et de spectateurs, quelques minutes avant que la flamme ne fût allumée dans l’antique temple grec d’Olympie, au milieu d’un dispositif de sécurité de 1 000 policiers et commandos. La cérémonie du 24 mars marque le début officiel du compte à rebours menant à l’ouverture des Jeux.
Selon RSF, la télévision d’État chinoise a présenté une scène préenregistrée pendant la perturbation, tandis que la télévision nationale grecque a interrompu la diffusion.
Quelques minutes plus tard, une dizaine de militants tibétains sont sortis d’un hôtel à Olympie et ont scandé des slogans hostiles au régime chinois au Tibet. Une femme s’est aspergée de peinture rouge et s’est étendue dans la rue principale du village, devant un coureur portant la flamme.
La police a détenu les trois membres de RSF et quelques-uns des militants tibétains. Les représentants de RSF ont été inculpés d’avoir affiché leur « mépris des symboles nationaux » et subiront leur procès le 29 mai.
« Nous ne pouvons pas laisser le gouvernement chinois confisquer la flamme olympique, symbole de paix, sans dénoncer la situation dramatique des droits de la personne dans le pays », souligne RSF dans une déclaration.
RSF, ainsi que d’autres membres de l’IFEX, condamne les violations des droits de la personne en Chine et la répression de la liberté de la presse devant l’agitation sociale qui secoue le Tibet.
Selon Human Rights Watch, la détermination des responsables olympiques de faire passer le flambeau olympique dans les rues de Lhassa, capitale du Tibet les 20 et 21 juin, pourrait inciter à de nouvelles protestations et provoquer encore plus de répression. « Le Tibet est ouvert ou il ne l’est pas. S’il l’est, qu’on laisse les observateurs indépendants et les médias y aller. S’il ne l’est pas, le flambeau ne doit pas y aller non plus », déclare Human Rights Watch.
La Chine fait face à un désastre de ses relations publiques depuis que les protestations ont éclaté à Lhassa le 10 mars, 49e anniversaire d’un soulèvement raté contre le régime chinois, et qu’elles se sont répandues à travers le Tibet et dans les provinces voisines. Les autorités chinoises ont réagi en dispersant les manifestations, dans certains cas par la violence.
Selon le gouvernement, 22 personnes ont perdu la vie dans des affrontements, mais le bilan est impossible à confirmer en raison du black-out des nouvelles imposé par la Chine sur la situation intérieure du pays. Selon les groupes d’exilés tibétains, au moins 80 personnes ont été tuées.
D’après le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), les médias d’État ne rapportent pas l’extension de la violence dans l’ouest de la Chine. Les censeurs du gouvernement ont accès aux reportages d’outre-mer et aux discussions en ligne, ce qui laisse un très grand nombre de personnes en Chine sans informations sur l’étendue des troubles. Par ailleurs, la presse d’État diffuse des déclarations partiales d’officiels qui flétrissent « la clique du Dalaï Lama », « les émeutiers » et les médias d’informations étrangers, dit RSF.
Le gouvernement chinois continue d’interdire et d’expulser des journalistes étrangers du Tibet et des provinces voisines de Gansu, Qinghai et du Sichuan, ainsi que de la capitale, Pékin, indiquent RSF et le CPJ. Des journalistes ont été détenus temporairement et suivis. RSF a recensé plus de 40 violations graves des droits des journalistes étrangers depuis le début des protestations, le 10 mars.
« Les autorités chinoises sont en train de régler le problème des manifestations de Tibétains par la force et le silence », dit RSF. « Après avoir débarrassé le Tibet et ses régions avoisinantes des observateurs indésirables – journalistes et touristes étrangers – les forces de sécurité écrasent les manifestations loin de tout regard. »
Par ailleurs, les lignes de communication sont coupées ou fortement entravées. Les stations de radio internationales sont brouillées au Tibet et les propriétaires de cafés Internet sont contraints d’accroître leur surveillance des clients pour empêcher l’envoi à l’étranger de photos et de vidéos, rapporte RSF. En même temps, les services téléphoniques subissent toujours d’importantes interruptions.
La répression ne se confine pas aux frontières de la Chine. Au Népal, la police a dispersé lundi une manifestation de centaines de réfugiés et de moines tibétains près des bureaux des Nations Unies à Katmandou. Les manifestants, qui exigeaient une enquête de l’ONU sur la répression, ont été battus à coups de bâtons de bambou et au moins 40 d’entre eux ont été arrêtés, disent les dépêches.
Human Rights Watch presse le Népal de cesser de faire « ce que Pékin lui dit » et de mettre fin à sa répression des exilés tibétains qui protestent contre la Chine. Le Népal, refuge de milliers de Tibétains, a annoncé qu’il ne permettrait aucune manifestation contre « un pays ami », notamment la Chine.
RSF, le CPJ, Human Rights Watch, ainsi qu’ARTICLE 19 et l’Association mondiale des journaux (AMJ), qui sont membres de l’IFEX, exigent du gouvernement chinois qu’il lève le verrouillage de toutes les zones du Tibet et qu’il laisse plein accès aux médias et aux observateurs indépendants.
Human Rights Watch et RSF demandent en outre la tenue d’une enquête indépendante, présidée idéalement par les Nations Unies, sur les événements survenus récemment au Tibet.
Consulter les sites suivants :
– RSF, à propos des manifestations à Olympie : http://tinyurl.com/2kwbxu
– RSF, à propos du Tibet : http://tinyurl.com/33eyaw
– ARTICLE 19 : http://tinyurl.com/39gkzd
– AMJ: http://www.wan-press.org/article16744.html
– Page de Human Rights Watch sur le Tibet : http://tinyurl.com/2twjcy
– Page de l’IFEX sur le Tibet : http://tinyurl.com/yvwgr4
– CPJ : http://tinyurl.com/22vwdv
– Campagne Libérez le Tibet, avec liens aux nouvelles internationales : http://www.freetibet.org/
– Campagne de la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH) sur la Chine : http://tinyurl.com/25d2l4
– Lettre ouverte de 29 intellectuels chinois proposant 12 suggestions pour le Tibet : http://tinyurl.com/ytpjzj
– Signez une pétition d’appui à l’appel du Dalaï Lama en faveur du dialogue et des droits de la personne au Tibet : http://tinyurl.com/3x2efd
(Photo : Un manifestant de Reporters sans frontières est arrêté pendant la cérémonie d’allumage de la flamme olympique des Jeux de 2008 de Pékin, qui se déroulait à Olympie, en Grèce, le 24 mars. Photo courtoisie de Reuters/Mal Langsdon)
(25 mars 2008)