(RSF/IFEX) – L’ancien éditorialiste du quotidien « Milli Gazete », Hakan Albayrak, a été incarcéré le 20 mai 2004. Il doit purger une peine de quinze mois de prison ferme pour « atteinte à la mémoire d’Atatürk ». Le même jour, le quotidien « Vakit » a été condamné à payer l’équivalent de 500 000 euros (environ 605 000 $US) de […]
(RSF/IFEX) – L’ancien éditorialiste du quotidien « Milli Gazete », Hakan Albayrak, a été incarcéré le 20 mai 2004. Il doit purger une peine de quinze mois de prison ferme pour « atteinte à la mémoire d’Atatürk ». Le même jour, le quotidien « Vakit » a été condamné à payer l’équivalent de 500 000 euros (environ 605 000 $US) de dommages et intérêts pour diffamation à l’encontre de 312 généraux.
RSF est choquée par cette incarcération contraire aux recommandations des Nations unies et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), selon lesquelles les délits de presse ne doivent pas être sanctionnés par des peines de prison.
« Il est indigne d’une démocratie d’enfermer un journaliste pour avoir écrit un article, quel qu’il soit. Nous exigeons sa libération immédiate », a écrit l’organisation au ministre de la Justice, Cemil Cicek. RSF a également dénoncé la somme exorbitante demandée à « Vakit », qui signe l’arrêt de mort du journal.
Le 20 mai, Albayrak a été incarcéré à la prison de Kalecik (Ankara). Le journaliste a été reconnu coupable d' »atteinte à la mémoire d’Atatürk » en vertu de la loi relative aux crimes contre Atatürk de 1951. L’article 1 de cette loi sanctionne l’insulte envers la mémoire du fondateur de la République de Turquie par une peine de un à trois ans de prison. L’article 2 prévoit le doublement de la peine si le crime est commis par voie de presse.
L’éditorial incriminé, publié en 2000, critiquait le fait que des prières aient été récitées lors de l’enterrement de l’écrivain athée Mina Urgan, et établissait un parallèle avec les funérailles d’Atatürk. Le texte se terminait ainsi : « Le pacha Mustapha Kemal n’avait-il pas été enterré sans prières ? Ni l’Etat ni la société ne s’étaient alors sentis gênés ».
Le même jour, le propriétaire du quotidien « Vakit », Nuri Aykon, son rédacteur en chef, Harum Aksoy, et Mehmet Dogan, auteur d’un article publié le 25 août 2003, ont été condamnés en première instance à payer environ 500 000 euros à 312 généraux de l’armée turque.
Dans l’article intitulé « Le pays où un soldat qui ne mérite pas d’être sergent devient général », publié sous un pseudonyme, l’auteur dénonçait l’incompétence des hauts gradés sans toutefois en nommer aucun. Tous les généraux ayant porté plainte se sont vus accorder les dommages et intérêts réclamés.
Le journal entend faire appel de ce jugement. Selon l’avocat du quotidien, Haci Ali Ozhan, cette sentence est dangereuse dans la mesure où elle pourrait faire jurisprudence.