Bien que le premier ministre de la Thaïlande ait refusé de déclarer l’état d’urgence à Bangkok, le gouvernement continue de réprimer les dissidents et le droit à la libre expression, par la censure et d’autres moyens. « Si la situation ne comporte pas d’urgence mettant en danger la stabilité du pays, nous ne pouvons recourir […]
Bien que le premier ministre de la Thaïlande ait refusé de déclarer l’état d’urgence à Bangkok, le gouvernement continue de réprimer les dissidents et le droit à la libre expression, par la censure et d’autres moyens.
« Si la situation ne comporte pas d’urgence mettant en danger la stabilité du pays, nous ne pouvons recourir à cette loi », a déclaré le premier ministre par intérim Surayud Chulanont devant les reporters après une rencontre avec le général Sonthi Boonyaratglin, auteur du coup d’État de septembre 2006, qui avait prié le premier ministre de proclamer l’état d’urgence. Un référendum sur la Constitution, actuellement à l’état de projet, serait tenu en septembre au plus tard, dit-il, et des élections auraient lieu le 16 ou le 23 décembre de cette année.
D’après l’Alliance de la presse de l’Asie du Sud-Est (Southeast Asian Press Alliance, SEAPA), Boonyaratglin a laissé entendre que des mesures d’urgence étaient nécessaires pour « maintenir la loi et l’ordre » et réprimer les nombreuses manifestations d’hostilité au coup d’État, qui prennent de l’ampleur depuis quelques semaines, la plupart étant dirigées par des partisans du premier ministre déchu Thaksin Shinawatra.
En dépit de concessions récentes de la part du premier ministre Chulanont, le gouvernement a imposé des mesures de censure très rigoureuses et refuse de lever l’interdit sur les activités des partis politiques. La presse, qui était dans l’ensemble favorable au départ de Thaksin, n’est pas beaucoup plus libre sous le gouvernement militaire, dit Reporters sans frontières (RSF).
La SEAPA et le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) rapportent que, le 13 mars, le ministère de l’Information et des Communications a bloqué un nouveau site web favorable à Thaksin – http://www.hi-thaksin.net – après que celui-ci eut affiché des séquences de celui-ci accueillant ses partisans politiques.
Au milieu d’un imposant dispositif de sécurité, les partisans de la chaîne de télévision par satellite People’s Television (PTV) ont organisé des rassemblements à Bangkok les 23 et 30 mars pour s’en prendre au gouvernement militaire qui interdit ses émissions. PTV a été créée en février à Hong Kong par des membres du parti de Thaksin, le Thai Rak Thai. Les rassemblements ont attiré de 3 000 à 4 000 personnes.
« La censure constante des nouvelles imposée par le gouvernement militaire est contredit totalement sa promesse de ramener le plus tôt possible la Thaïlande à la démocratie », dit le CPJ. « Nous demandons aux autorités de permettre à PTV de couvrir les nouvelles sans devoir subir le harcèlement du gouvernement. »
La répression ne se limite pas à ceux qui réprouvent le coup d’État. Sous la menace du crime de « lèse-majesté », la presse est limitée à ce qu’elle peut dire sur la monarchie, qui appuie le gouvernement militaire.
Le 29 mars, le propriétaire de « Manager Media Group » et principal adversaire de Thaksin, Sondhi Limthongkul, a été condamné à deux ans de prison pour avoir diffamé un ancien ministre du Thai Rak Thai. Sondhi l’avait faussement accusé d’être déloyal au Roi pendant une émission de télévision diffusée en direct en novembre 2005, selon ce que rapportent la SEAPA and CPJ. Sondhi, qui se trouvait l’an dernier à la tête de dizaines de milliers de manifestants contre Thaksin, a été libéré sous caution en attendant l’audition d’un appel.
Par ailleurs, un ressortissant suisse qui avait plaidé coupable à l’accusation d’avoir vandalisé des portraits du roi de Thaïlande a été condamné le 29 mars à 10 ans de prison. C’est la première fois en une décennie qu’un étranger est reconnu coupable du crime de « lèse-majesté ». Oliver Jufer, qui vit en Thaïlande depuis plus de dix ans, a été arrêté en décembre dernier après avoir maculé, pendant qu’il était en état d’ébriété, des portraits du roi Bhumibol Adulyadej le jour anniversaire du roi, dans la ville septentrionale de Chiang Mai. Jufer dispose d’un mois pour interjeter appel de la sentence.
Consulter les sites suivants :
– SEAPA « Coup leader wants emergency rule in Bangkok to curb protests », « Thai media mogul sentenced to two years imprisonment » : http://www.seapabkk.org
– CPJ « Thailand’s military gouvernement censors satellite TV station » : http://www.cpj.org/news/2007/asia/thai20mar07na.html
– CPJ « Media mogul receives two-year jail sentence for defamation » : http://www.cpj.org/news/2007/asia/thai30mar07na.html
– Rapport annuel de 2007 de RSF sur la Thaïlande :
http://www.rsf.org/article.php3?id_article=20800
– Journal « New York Times » : http://tinyurl.com/323l9e
– Dernières nouvelles sur la Thaïlande sur « AsiaMedia » : http://www.asiamedia.ucla.edu/southeastasia.asp
(Photo : Le gouvernement a bloqué le site web favourable à Thaksin www.hi-thaksin.net après la publication de cette photo et d?autres images du Thaksin avec ses partisans.)
(3 avril 2007)