RSF salue les progrès dans l'enquête menée sur l'assassinat du journaliste Cihan Hayirsevener et espère qu'elle sera menée à son terme.
(RSF/IFEX) – Le 30 août 2012 – Reporters sans frontières salue les progrès dans l’enquête menée sur l’assassinat, en 2009, du journaliste Cihan Hayirsevener. L’organisation espère qu’elle sera menée à son terme, malgré les lenteurs et les négligences qui restent à déplorer. Une détermination similaire est attendue dans le traitement des nombreux autres cas d’agressions et de violences contre les professionnels des médias, qui demeurent très largement impunis.
Le 28 août 2012, s’est tenue la cinquième audience du procès des assassins présumés de Cihan Hayirsevener, le fondateur et rédacteur en chef du journal local Güney Marmara’da Yasam, abattu en plein jour à Bandirma (sud-ouest d’Istanbul), le 18 décembre 2009.
« Malgré les lenteurs habituelles de la justice turque, le traitement de cette affaire est encourageant, a déclaré Reporters sans frontières. Les enquêtes sérieuses sur des cas de violence contre les journalistes sont trop rares en Turquie pour ne pas être saluées. Les juges sont véritablement attendus quant à leur capacité de rendre justice aux proches et aux collègues de Cihan Hayirsevener. Ils auront également la responsabilité du signal qui sera envoyé à des centaines de professionnels des médias, aux prises avec de puissants intérêts locaux ou hésitant à enquêter sur des cas de corruption par crainte de représailles. »
Le lien entre l’assassinat de Cihan Hayirsevener et ses activités professionnelles a été largement démontré par l’instruction. Il a été consacré par la fusion, en mai 2011, de l’enquête sur l’assassinat du journaliste avec un dossier portant sur des malversations financières impliquant la municipalité de Bandirma et de puissants hommes d’affaires locaux. Tous les témoignages recueillis par Reporters sans frontières lors de sa propre enquête, menée à Bandirma une quinzaine de jours après le drame, allaient également dans ce sens : Cihan Hayirsevener a de toutes évidences payé de sa vie sa couverture opiniâtre d’une affaire extrêmement dérangeante pour des personnalités locales.
Après de longues tergiversations, les juges ont finalement retenu la qualification de « crime prémédité et organisé », contrairement aux déclarations du tireur, Serkan Erakkus, qui prétend avoir abattu le journaliste au terme d’une altercation. Plusieurs témoins ont confirmé à la cour et à Reporters sans frontières avoir aperçu le tireur, rôdant près des locaux de Marmara TV et de Güney Marmara’da Yasam, plusieurs jours avant l’assassinat.
Lors de la précédente audience, le 22 mai 2012, un témoin oculaire, dont l’identité a été maintenue secrète, a formellement désigné Serkan Erakkus comme le tireur et a raconté en détails le déroulement des faits. Son récit confirme que le journaliste avait été frappé au crâne par derrière puis visé aux jambes à plusieurs reprises et à courte distance. Un autre témoin, Seçil Kip, proche de la famille Kuruoglu avant le drame, s’est finalement rétractée après avoir initialement déclaré avoir vu l’arme du crime avant l’assassinat.
Dix-huit suspects répondent devant la 10e chambre de la cour d’Assises d’Istanbul des chefs d’inculpation d’assassinat et de malversations financières. Trois d’entre eux sont maintenus en détention provisoire en attente du jugement : le tireur présumé Serkan Erakkus, le commanditaire présumé Ihsan Kuruoglu, ainsi que le chauffeur de ce dernier, Kerem Yilmaz, complice présumé.