Quatre mois après la tenue des élections qui ont plongé le pays dans une profonde crise politique, le constat qui se dégage est que les journalistes et les médias ont été les cibles de plusieurs attaques et autres menaces visant à restreindre leur liberté d'expression et d'information.
(JED/IFEX) – Kinshasa, le 2 mai 2012 – A l’occasion de la célébration, jeudi 3 mai 2012, de la Journée mondiale de la liberté de la presse, laquelle intervient au moment où la République Démocratique du Congo est en train de mettre en place ses nouvelles institutions issues des élections présidentielle et législative du 28 novembre dernier, Journaliste en danger (JED) tire la sonnette d’alarme sur la détérioration accrue de la liberté de la presse en RDC depuis la fin des élections. JED demande instamment aux nouvelles autorités de tout mettre en œuvre pour stopper les attaques dirigées contre les professionnels des médias.
Quatre mois après la tenue des élections qui ont plongé le pays dans une profonde crise politique, le constat qui se dégage est que les journalistes et les médias ont été les cibles de plusieurs attaques et autres menaces visant à restreindre leur liberté d’expression et d’information.
Depuis le début de cette année, JED a documenté au total 64 divers cas avérés d’atteinte à la liberté de la presse sur l’ensemble du territoire national.
Ces violations se repartissent de la manière suivante :
– 01 journaliste arrêté et jeté en prison au Bas-Congo
– 21 journalistes interpellés par divers services de sécurité ou de renseignement
– 05 cas d’agression contre les professionnels des médias pendant leur travail
– 04 cas de menace directe ou anonyme dirigée contre les journalistes
– 04 cas de pression judiciaire ou administrative sur les journalistes ou les organes de presse
– 29 cas de censure ou d’entrave au travail des journalistes
A la même période du 03 mai 2011, JED avait recensé 35 cas d’attaque ou d’atteinte à la liberté de la presse. En comparant les chiffres des deux périodes de 2011 et 2012, soit 29 cas de différence, on constate que la situation de la liberté de la presse s’est détériorée de 83%.
L’analyse de ces chiffres indique une augmentation sensible des cas de censure ou entrave au travail des journalistes (+20), ainsi qu’une augmentation des cas d’interpellation des journalistes (+11).
Cette détérioration du climat de la liberté de la presse est surtout consécutive à la crise politique qui s’est installée dans le pays à l’issue des dernières élections présidentielle et législative qui ont vu le Président Joseph Kabila être désigné vainqueur, tandis que son principal challenger, Etienne Tshisekedi, en a contesté les résultats en s’autoproclamant Président de la République.
Depuis, les journalistes semblaient être pris dans la tourmente de cet imbroglio politique. A titre illustratif de ces atteintes au droit d’informer et d’être informé, on peut citer notamment:
– La coupure du signal de la Radio France Internationale (RFI) pendant 10 jours, du 31 décembre 2011 au 09 janvier 2012, sur ordre de M. Lambert Mende, ministre de la Communication et des Médias. Le gouvernement de Kinshasa avait mal digéré la « juxtaposition » du message des vœux de M. Etienne Tshisekedi (président autoproclamé) à celui du président Joseph Kabila, proclamé élu à l’issue des présidentielles controversées du 28 novembre 2011.
– La Radio Communautaire du Katanga (RCK), une station émettant à Lubumbashi, capitale de la province du Katanga, a vu son signal coupé, jeudi 5 janvier 2012, pendant six jours sur ordre de M. Munkanya Ilunga, chef de division de la communication du Katanga. La RCK a été accusée d’avoir relayé les programmes de la RFI, interdits par les autorités de Kinshasa.
– Des interpellations systématiques de tous les journalistes et des correspondants de presse, nationaux et internationaux, qui tentaient de faire leur travail dans le périmètre de la résidence de M. Tshisekedi où une sorte de blocus a été imposée.
– La coupure brutale du signal de trois chaînes de télévision, Radio Télévision Catholique Elikya (RTCE), Canal Congo Télévision (CCTV) et Canal Kin Télévision (CKTV), à la veille de la marche annoncée des chrétiens du 16 février, accusées de faire la propagande de cette marche.
– La lettre du ministre de la justice adressée à la Commission de censure et interdisant la diffusion du film documentaire du journaliste belge Thierry Michel sur « L’affaire Chebeya ».
Face à ce climat d’hostilité au travail de la presse, JED réitère ses appels au nouveau gouvernement pour faire cesser tous les actes visant à restreindre la liberté d’expression. JED demande surtout aux nouvelles institutions de la République d’initier rapidement des projets des lois en vue de l’amélioration du cadre juridique de l’exercice de la liberté de la presse.