Plus de 100 journalistes ont perdu la vie au cours des six derniers mois. Ce bilan semble indiquer qu’on s’apprête à dépasser le nombre record atteint en 2006, rapporte l’International News Safety Institute (INSI). « L’évolution est troublante. Nous n’avons jamais connu un tel bilan au mitan de l’année, et nous craignons ce qui pourrait […]
Plus de 100 journalistes ont perdu la vie au cours des six derniers mois. Ce bilan semble indiquer qu’on s’apprête à dépasser le nombre record atteint en 2006, rapporte l’International News Safety Institute (INSI).
« L’évolution est troublante. Nous n’avons jamais connu un tel bilan au mitan de l’année, et nous craignons ce qui pourrait encore arriver », dit le directeur de l’INSI, Rodney Pinder.
D’après l’INSI, 72 des cas de mortalité qui sont survenus partout dans le monde au cours des six derniers mois étaient des meurtres, parmi lesquels certains cas ont connu un grand retentissement, comme celui de Hrant Dink, le rédacteur très médiatisé d’un journal arménien en Turquie, abattu à l’extérieur de son bureau à Istanbul, celui du photographe pigiste Edward Chikombo, dont le cadavre couvert de marques a été trouvé dans un buisson en bordure de la route au Zimbabwe, et ceux d’Ajmal Naqshbandi et de Syed Agha, enlevés par les talibans en Afghanistan en compagnie du reporter italien Daniele Mastrogiacomo. Mastrogiacomo a été relâché indemne.
« La plupart des morts étaient des artisans peu connus à l’extérieur de leur propre pays, où ils étaient ciblés pace qu’ils s’efforçaient de faire leur travail de tous les jours », a déclaré Pinder.
Tandis que la plupart des assaillants de journalistes s’en tirent en toute impunité – près de 90 pour 100, selon le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) – en Chine, dans un geste surprise de l’État, sept hommes ont été incarcérés la semaine dernière pour le meurtre du reporter d’enquête Lan Chengzhang, mort début janvier après avoir subi une raclée pour avoir couvert une affaire de mine de charbon illégale dans la province de Shanxi, selon ce que rapporte la Fédération internationale des journalistes (FIJ).
L’Irak reste le point chaud le plus meurtrier – on y recense 42 journalistes et artisans des médias tués cette année seulement, alors qu’on en comptait 28 à pareille date l’an dernier. La grande majorité d’entre eux étaient des journalistes irakiens assassinés par des inconnus. Selon l’INSI, quatre autres journalistes ont été tués en Irak la semaine dernière, ce qui porte à 214 le total des travailleurs des médias qui ont perdu la vie en Irak depuis le début de l’invasion, en mars 2003.
Le poète et journaliste Rahim al-Maliki, animateur de deux émissions culturelles sur « Al-Iraqiya TV », figure parmi les 13 personnes tuées le 25 juin dans un attentat-suicide contre l’Hôtel Mansour à Bagdad, tandis qu’il couvrait une réunion de chefs tribaux, rapporte Reporters sans frontières (RSF).
Le lendemain, le reporter vétéran Hamed Sarhan était pris et abattu dans une embuscade à Bagdad tandis qu’il rentrait chez lui en voiture, dit RSF. Pendant plus de 30 ans, Sarhan avait travaillé à l’agence de nouvelles appartenant à l’État, jusqu’à l’invasion de l’Irak par les États-Unis. Depuis, il travaillait pour l’agence de nouvelles privée Iraquion.
ARTICLE 19 rapporte que Zena Shakir Mahmoud, journaliste au journal « Al-Haqiqa » du parti kurde et ancienne présentatrice des nouvelles pour une station de radio irakienne, a été abattue le 24 juin à Mossoul tandis qu’elle rentrait chez elle.
Quant à Luay Suleiman, reporter chrétien travaillant au journal « Nineveh al-Hurra » de Mossoul, il a été trouvé mort le 27 juin, selon toute vraisemblance tué par balles, dit l’INSI.
Depuis la publication du rapport, le 28 juin, deux autres journalistes ont été trouvés morts en Irak. Il s’agit de correspondants de la station de télévision « Bagdad TV », qui appartient au Parti islamique irakien. Mohammed Hilal Karji a été enlevé à l’extérieur de chez lui le 8 juin tandis qu’il se rendait au travail, rapporte RSF. Son corps a été trouvé le lendemain à la morgue. Pour sa part, Sarmad Hamdi al-Hassani a été enlevé le 27 juin à son domicile de Bagdad; son corps a aussi été trouvé le lendemain à la morgue.
Après l’Irak, les pays où on a assassiné le plus de journalistes dans les six premiers mois de l’année sont l’Afghanistan (cinq), Haïti et les Philippines, avec quatre morts chacun, la Somalie, la Palestine et l’Inde (trois) et le Sri Lanka, le Mexico et le Brésil (deux).
En tant qu’organisation qui s’intéresse à la sécurité de l’information, l’INSI recense tous les types de décès – du meurtre à l’accident – de tous les participants de l’industrie de la collecte et de la production des nouvelles, qu’ils soient permanents ou pigistes, à condition d’être morts en raison de leur travail. Les chiffres rapportés par d’autres groupes membres de l’IFEX peuvent varier parce qu’ils tiennent leurs dossiers en fonction de leurs propres critères.
Consulter les sites suivants :
– INSI : http://www.newssafety.com/stories/insi/death07.htm
– Répertoire des journalistes et des travailleurs des médias tués, constitué par l’INSI : http://www.newssafety.com/casualties/2007.htm
– CPJ : http://www.cpj.org/killed/killed_archives/stats.html
– FIJ, à propos de Chengzhang : http://tinyurl.com/yqwv5b
– RSF, sur l’Irak : http://www.rsf.org/article.php3?id_article=22730
– RSF, à propos des reporters de la télévision de Bagdad : http://tinyurl.com/ypzhfu
– ARTICLE 19, à propos de Mahmoud : http://tinyurl.com/29bu6g
– Rapport d’ARTICLE 19 sur la couverture des relations hommes-femmes en Irak et dans les situations de conflit : http://tinyurl.com/2beskv
(Photo : Syed Agha, travailleur afghan des médias, enlevé et tué par les talibans en mars 2007. Photo courtoisie de Thomas Coghlan/RSF)
(3 juillet 2007)