La liberté d’expression est sous le feu des projecteurs cette semaine au Guatemala, à la suite de l’enlèvement à La Libertad de quatre journalistes guatémaltèques du quotidien « Prensa Libre » par d’anciens combattants paramilitaires. Bien que les journalistes aient été libérés le 28 octobre, l’enlèvement a mis en lumière les dangers que courent les […]
La liberté d’expression est sous le feu des projecteurs cette semaine au Guatemala, à la suite de l’enlèvement à La Libertad de quatre journalistes guatémaltèques du quotidien « Prensa Libre » par d’anciens combattants paramilitaires. Bien que les journalistes aient été libérés le 28 octobre, l’enlèvement a mis en lumière les dangers que courent les journalistes dans un pays connu pour être l’un des plus dangereux des Amériques.
Le 26 octobre, Freddy López, Alberto Ramírez, Emerson Díaz et Mario Linares ont été enlevés à La Libertad, dans le département de Huehuetenango, par d’anciens membres des Patrouilles de défense civile (PAC), un groupe paramilitaire, rapporte le Comité pour la protection des journalistes (CPJ).
L’enlèvement a suscité la réprobation de nombreux membres de l’IFEX, dont le CPJ, le Comité sur la liberté de la presse de l’Association des journalistes guatémaltèques (APG), Journalistes contre la corruption (Periodistas frente a la corrupción, PFC), Reporters sans frontières (RSF) et la Société interaméricaine de la presse (SIP).
Le Rapporteur spécial de l’Organisation des États américains (OEA) pour la liberté d’expression, Eduardo Bertoni, a également condamné l’enlèvement.
López et Díaz s’étaient rendus dans le département de Huehuetenango pour couvrir un rassemblement électoral de l’ancien dictateur et candidat présidentiel Efraín Ríos Montt, rapporte le CPJ. Ils ont été enlevés à un poste de contrôle des PAC. Ramírez et Linares, qui avaient été dépêchés pour couvrir l’enlèvement, ont été enlevés à leur tour.
Les ravisseurs exigeaient d’être indemnisés par le gouvernement pour les services rendus pendant les 36 ans de la guerre civile, qui a pris fin en 1996 après avoir coûté la vie de plus de 200 000 personnes. Le président du Guatemala, Alphonso Portillo, avait promis de verser 680 $ US à chacun des quelque 500 000 anciens membres des PAC qui ont été recrutés par l’armée pour combattre les rebelles gauchistes, fait remarquer RSF.
Le geste avait été largement perçu comme une tentative du Front républicain guatémaltèque (FRG), le parti au pouvoir de Portillo, pour rallier le soutien populaire dans le dernier droit précédant le scrutin présidentiel de novembre. Ríos Montt est le candidat du FRG à la présidence et de récents sondages le placent troisième.
D’après un reportage de Reuters, les personnes qui ont enlevé les quatre journalistes craignaient qu’une défaite électorale de Ríos Montt anéantirait leurs espoirs de toucher un dédommagement.
Selon Human Rights Watch, sous la houlette de Ríos Montt, entre 1982 et 1983, l’armée guatémaltèque a commis des milliers de massacres et d’exécutions dans le cadre de sa campagne dite de la « terre brûlée ».
L’enlèvement des journalistes est survenu tandis que le CPJ menait une mission d’enquête au Guatemala, où celle-ci a rencontré des représentants du gouvernement, des journalistes et des groupes de défense des droits de la personne afin d’évaluer la situation de la liberté de la presse dans le pays. Selon le CPJ, les risques que courent les journalistes dans l’intérieur du pays sont encore plus grands qu’à Guatemala, la capitale.
« Les journalistes guatémaltèques travaillent dans un climat d’hostilité et sont la cible d’intimidation de la part de politiciens corrompus, de trafiquants de drogue, du crime organisé et de groupes clandestins », dit le groupe.
Lors d’une rencontre avec Marco Antonio Cortez, procureur spécial pour les crimes contre les journalistes et les syndicalistes relevant du bureau du Procureur général, le CPJ a relevé que le gouvernement n’avait réalisé aucun progrès dans les enquêtes sur plus de 60 cas d’attaques et de menaces contre des journalistes survenus cette année.
Par ailleurs, l’APG et d’autres groupes de défense de la liberté de la presse prient instamment les autorités du Guatemala d’inviter le Rapporteur de l’OEA sur la libre expression, qui a demandé à se rendre dans le pays pour examiner la situation de la libre expression.
Lire le rapport du CPJ à propos de sa mission sur la liberté de la presse : http://www.cpj.org/news/2003/Guatemala24oct03na.html
Pour rester informés de la situation au Guatemala, consulter :
– IFEX : http://ifex.org/en/content/view/full/98/
– Rapport de RSF : http://www.rsf.org/article.php3?id_article=8357
– Journalistes contre la corruption : http://www.portal-pfc.org/
– SIP : http://www.sipiapa.com/pulications/report_guatemala2004.cfm
– Le CJFE décerne à un Guatémaltèque un prix de la liberté de la presse : http://www.cjfe.org/
– Human Rights Watch sur les raisons qui rendent Ríos Montt inapte à la présidence :
http://www.hrw.org/press/2003/07/guatemala071503.htm
– Rapporteur de l’OEA pour la liberté d’expression :
http://www.cidh.oas.org/Relatoria/English/PressRel03/PRelease9403.htm
(Image: © Human Rights Watch)