(RSF/IFEX) – Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a gagné, le 5 avril 2005, un procès en diffamation à l’encontre du journaliste Fikret Otyam. Ce dernier doit lui verser 2 835 euros (environ 3 660 $US) de dommages et intérêts. C’est au moins la quatrième fois depuis décembre 2004 que Erdogan intente un procès […]
(RSF/IFEX) – Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a gagné, le 5 avril 2005, un procès en diffamation à l’encontre du journaliste Fikret Otyam. Ce dernier doit lui verser 2 835 euros (environ 3 660 $US) de dommages et intérêts. C’est au moins la quatrième fois depuis décembre 2004 que Erdogan intente un procès à l’encontre d’un journaliste.
RSF s’insurge contre cet acharnement judiciaire du Premier ministre turc à l’encontre des journalistes le brocardant. « La liberté d’expression et la liberté de la presse, principes fondamentaux des standards juridiques européens, ne peuvent souffrir de restrictions. Les journalistes turcs, à l’image de leurs confrères européens, doivent pouvoir tenir des propos satiriques à l’encontre des autorités turques, sans craindre d’être systématiquement poursuivis en justice. Ils risquent, sinon, de pratiquer une autocensure très nuisible à la liberté de la presse », a déclaré l’organisation.
Otyam, également peintre célèbre et âgé aujourd’hui de 79 ans, avait publié récemment, dans l’hebdomadaire « Aydinlik », un article sarcastique qui se moquait de la politique du Premier ministre turc concernant l’adultère. La phrase incriminée était la suivante : « Recep a abaissé avec succès le débat (sur l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne) au niveau de l’entrejambe ». Le Premier ministre, n’ayant visiblement pas un très grand sens de l’humour, a saisi en diffamation la 13e chambre tribunal de police d’Ankara, qui lui a donné raison dans un arrêt daté du 5 avril.
Le Premier ministre a également intenté plusieurs procès à la fin du mois de mars à l’encontre de « Penguen », un hebdomadaire satirique, pour une caricature, datée du 24 février et intitulée « le monde de Tayyip », dans laquelle il était représenté sous la forme de divers animaux. Erdogan réclame à « Penguen » pas moins de 24 000 euros (environ 31 000 $US) de dommages et intérêtes.
Erdogan avait déjà auparavant porté plainte contre deux dessinateurs. Pour avoir caricaturé en chat la tête du Premier ministre, Musa Kart, caricaturiste du quotidien républicain de gauche « Cumhuriyet », avait été condamné, le 21 décembre 2004, par la 8e chambre du tribunal correctionnel d’Ankara, à une amende d’environ 3 000 euros (environ 3 880 $US).
Le Premier ministre turc avait également déposé une plainte pour diffamation contre le caricaturiste Sefer Selvi, qui avait représenté Cûneyt Zapsu, son conseiller, sur le dos du chef de l ‘exécutif, pour le quotidien de gauche « Günlük Evrensel ». Le procès est toujours en cours.
Ces divers procès intentés par le Premier ministre, qui s’affirme pourtant déterminé à accroître les libertés en Turquie en vue de sa future adhésion à l’Union européenne, ont entraîné une vague de protestations très vives dans la presse turque.