Au cours de la semaine dernière, au moins 75 personnes, dont deux journalistes, qui avaient été arrêtées pendant les manifestations de septembre en Birmanie, ont été libérées de la prison d’Insein, selon ce que rapporte l’agence de nouvelles birmane Mizzima News. Le Groupe d’Action de l’IFEX sur la Birmanie appelle l’ONU à venir en aide […]
Au cours de la semaine dernière, au moins 75 personnes, dont deux journalistes, qui avaient été arrêtées pendant les manifestations de septembre en Birmanie, ont été libérées de la prison d’Insein, selon ce que rapporte l’agence de nouvelles birmane Mizzima News. Le Groupe d’Action de l’IFEX sur la Birmanie appelle l’ONU à venir en aide aux reporters exilés et à enquêter publiquement sur les cas des journalistes disparus, emprisonnés et assassinés. Par ailleurs, un militant qui a été libéré récemment a décrit sa détention.
Le comédien, poète et militant d’opposition Zarganar a été libéré le 17 octobre après un séjour extrêmement pénible de trois semaines en prison. Il a été arrêté le 25 septembre par une équipe « de descente et de fouille » composée de huit individus parce qu’il avait offert des aumônes aux moines qui protestaient à la Pagode de Shwedagon, à Rangoon.
Dans une entrevue exclusive à Mizzima News, Zarganar parle de la vie derrière les barreaux et dit pourquoi, bien que les manifestations aient cessé dans les rues, la lutte contre le pouvoir militaire n’est pas encore terminée. Voici une version abrégée de cette entrevue :
Nous avons entendu dire que vous aviez été placé dans la niche d’un chien de l’armée. De quelle sorte d’endroit s’agit-il ?
La niche d’un chien de l’armée est une cellule spéciale réservée aux prisonniers qui commettent des crimes en prison. Ces criminels sont enchaînés et envoyés là en signe de punition supplémentaire. Ils sont placés en isolement et détenus au secret. Il y a environ 30 chiens bergers allemands qui gardent ce type de cellule; c’est pourquoi on appelle cela une niche de chien de l’armée.
La cellule mesure environ huit pieds sur dix. On ne peut pas voir dehors. Il n’y a pas de ventilation convenable et parfois il fait trop froid. On m’a fait dormir sur une planche de bois et je n’ai pu prendre un bain que le troisième jour (de ma détention). La nourriture est abominable, tout comme les conditions de vie. Pas de toilettes. Je n’avais qu’une assiette pour uriner et excréter. Je ne pouvais utiliser cette assiette qu’une seule fois par jour parce qu’elle était pleine après une seule utilisation. J’ai dû passer sept ou huit jours là-bas. J’ai attrapé la pneumonie.
Êtes-vous surveillé depuis votre remise en liberté ?
Oui. Ils continuent de me surveiller à partir de certains cafés et petits restaurants situés devant chez moi. Les membres du CPD (Conseil Paix et Développement, l’administration de la junte militaire à l’échelon local) au niveau de la rue m’ont dit à l’avance qu’ils allaient le faire. Je m’en fiche. Qu’ils restent et me surveillent. Je sors comme d’habitude.
Nous avons entendu dire que les autorités ont interdit à 19 rédacteurs et artistes d’écrire et de donner des performances parce qu’ils avaient offert des aumônes aux moines qui protestaient à Shwedagon. Comment cette interdiction les touche-t-elle ?
On m’interdit depuis près de deux ans maintenant. Cette interdiction touche le mode de vie. Comment pouvons-nous survivre sans travailler? Nous ne savons rien des autres métiers. Nous ne pouvons apprendre comment tirer du fusil à cet âge. Pour ce qui est des gens, ils doivent souffrir, eux aussi; ils ne peuvent pas lire les ouvrages de ces écrivains ni voir les films de ces artistes.
La plupart des dirigeants étudiants et des moines ont été arrêtés. Pensez-vous que le mouvement a cessé?
On ne peut pas dire que le mouvement ait cessé. Le feu couve sous les braises. Ce n’est que temporaire; on ne peut pas l’arrêter. Le mouvement couve dans le coeur et dans l’esprit des gens.
Si les protestations récentes couvent toujours, le mouvement peut-il renaître ?
Le mouvement reprendra sous différentes formes. Si le SPDC nous donne ce que nous demandons, il n’y aura plus de protestations. Mais s’ils nous donnent ce que nous ne voulons pas, cela ressuscitera le mouvement. Personne ne peut oublier ce qu’il a vu et ce qu’il a rencontré pendant les récentes protestations. Le mouvement peut ne pas revenir sous la même forme que récemment, sacrifier beaucoup de vies humaines et endommager l’existence de beaucoup de gens. Il est prématuré pour moi de dire quelle forme prendra la lutte. Mais il est certain que les protestations et le mouvement vont revenir.
Lire l’entrevue au complet ici (en anglais) : http://ifex.org/en/content/view/full/87343/
(30 octobre 2007)