Un tour d’horizon des principales informations sur la libre expression en Afrique, basé sur les rapports des membres de l'IFEX.
Un journaliste somalien tué par balle
Abdullahi Mire Hashi, étudiant à l’université et journaliste, a été tué par balle peu après avoir assisté aux prières de l’après-midi dans une mosquée. Le producteur, âgé de 26 ans, animait une émission quotidienne – Ce matin sur Darul Sunnah – sur la station de radio privée somalienne Darul Sunnah. L’émission était axée sur les problèmes locaux avec des auditeurs qui appellaient pour décrire les conditions dans leurs quartiers.
Selon une déclaration du CPJ, trois journalistes locaux, qui préfèrent rester anonymes par crainte de représailles, ont déclaré qu’avant son assassinat, Abdullahi avait reçu des appels téléphoniques anonymes demandant pourquoi la chaîne ne couvrait pas les opérations d’Al-Shabaab dans la région. La ville d’Elisha Bihaya, où l’incident a eu lieu, se trouve à 17 km de Mogadiscio et est souvent attaquée par des militants d’Al-Shabaab.
Alors que le Réseau de journalistes pour les droits humains ainsi que d’autres groupes de pression des médias exigent une enquête sur le meurtre d’Abdullahi, il est peu probable que les coupables soient un jour arrêtés. L’Indice mondial d’impunité du CPJ, édition 2018, publié à l’occasion de la Journée internationale pour mettre fin à l’impunité (2 novembre), place la Somalie en tête de la liste des pays où les poursuites contre les assassins de journalistes ont été les pires.
Today as the world marks International Day to End Impunity for crimes against journalists (IDEI), HRJ denounces the culture of impunity in Somalia where 3 journos have been killed in 2018 and demands authorities in Somalia to bring those behind attacks against journos to justice. pic.twitter.com/KQYTPYiBV8
— Human Rights Journalists (@HRJournalists) November 2, 2018
Aujourd’hui, alors que le monde célèbre la Journée internationale pour mettre fin à l’impunité pour les crimes commis contre les journalistes (IDEI), HRJ dénonce la culture de l’impunité en Somalie, où trois journalistes ont été assassinés en 2018, et exige que les autorités somaliennes traduisent en justice les auteurs des attaques contre les journalistes.
Contrairement à la situation instable qui règne en Somalie, le paysage politique et médiatique de la Gambie connaît actuellement une transformation encourageante. En tant que candidat le moins probable à accéder au pouvoir, le président Adama Barrow a surpris les citoyens avec son style de leadership plus ouvert lorsqu’il pousse à la transparence, la redevabilité et à des réformes démocratiques. La dissidence et les critiques de l’État ou de l’ancien président Jammeh n’étaient pas été tolérées pendant les 22 années de pouvoir de ce dernier. Ses tactiques de marque étaient les arrestations, la torture, le viol et les disparitions forcées.
La Gambie lance la Commission Vérité, Réconciliation et Réparations
Soucieux de « débarasser le pays de son sombre passé », le président Barrow a officiellement lancé la Commission vérité, réconciliation et réparations (CVRR) à la mi-octobre. La commission, qui a un mandat de deux ans pour passer en revue les violations des droits humains et les abus commis entre juillet 1994 et janvier 2017, a été créée en vertu d’une loi adoptée par le Parlement en 2017.
Dans ses Lettres à l’Afrique, Lamin Cham, ancien reporter de la BBC et aujourd’hui rédacteur en chef du journal Gambia’s Standard, tient fermement à témoigner devant la CVRR. Même si ses tortionnaires sont décédés, Cham estime que son témoignage exposera d’autres complices et empêchera ce type d’oppression à l’avenir.
Les amendements tanzaniens à la loi interdisent la remise en cause des statistiques
La Tanzanie, quant à elle, est habituée à modifier ou à élaborer des lois apparemment anodines, tout en s’efforçant d’y inclure des clauses visant à supprimer les informations dissidentes.
Les amendements à la Loi de 2015 sur les statistiques de la Tanzanie ont finalement été approuvés par les législateurs à la fin du mois de septembre. Parallèlement aux changements progressistes, le gouvernement a réussi à insérer une clause interdisant à quiconque de publier des informations statistiques non approuvées ou non conformes à la méthodologie du Bureau national des statistiques. Quiconque conteste les statistiques officielles sera poursuivi et devra payer une amende ou subir une peine minimale de trois ans d’emprisonnement, voire les deux.
Les objections exprimées par les organisations de la société civile lorsque les révisions avaient été introduites au début de l’année étaient en grande partie ignorées. Plus tôt ce mois-ci, la Banque mondiale a publié une déclaration dans laquelle elle exprimait sa préoccupation en soulignant le fait que les amendements étaient contraires aux normes internationales. Une référence particulière a été faite aux Principes fondamentaux des statistiques officielles des Nations Unies et à la Charte africaine sur les statistique.
La déclaration ajoute: « Il est essentiel que la Tanzanie, comme tout pays, utilise les lois sur les statistiques pour garantir que les statistiques officielles sont de haute qualité et fiables, tout en protégeant l’ouverture et la transparence de leur utilisation, afin de poursuivre le dialogue public dans l’intérêt des citoyens ».
Promouvoir des projets transfrontaliers de journalisme d’investigation collaboratif
Les 10 et 11 octobre, des journalistes de toute la région se sont réunis à Accra, au Ghana, pour la Conférence sur le journalisme d’investigation en Afrique de l’Ouest organisée par la Fondation des médias pour l’Afrique de l’Ouest en partenariat avec la DW Akademie.
Les 60 journalistes ont examiné une variété de sujets, dont l’état du journalisme en Afrique, la mise en place des réseaux de sécurité pour le journalisme d’investigation, les projets de collaboration transfrontaliers et les enseignements tirés des West Africa Leaks et des Panama Papers.
La conférence s’est terminée sur une note positive, avec l’adoption par les journalistes d’une résolution en sept points visant à promouvoir la collaboration transfrontalière en utilisant le journalisme d’investigation pour regler des questions de bonne gouvernance, de redevabilité et de développement socio-économique dans la région.
La résolution incluait l’engagement de créer un réseau transfrontalier vibrant et dynamique de journalistes d’investigation ouest-africains afin de faciliter la collaboration aux niveaux national et international et de s’attaquer aux problèmes urgents de bonne gouvernance, de démocratie, de transparence, de redevabilité et de développement socio-économique global dans la région.
Facebook renforce la vérification des faits avec un nouveau partenariat
Au début de ce mois, Facebook a annoncé le lancement de son programme tiers de vérification des faits en Afrique du Sud, en partenariat avec Africa Check et l’Agence France-Presse. L’initiative vise à lutter contre les fausses nouvelles délibérées et la désinformation répandues sur les plateformes en ligne et plus particulièrement sur Facebook.
Africa Check a annoncé son implication dans cette initiative dans un blog percutant, reprochant à Facebook de ne pas assumer sa responsabilité d’éditeur depuis de nombreuses années et soulignant les inconvénients de son précédent programme de vérification des faits.
En bref: RDC, Zimbabwe et Zambie
De nombreuses arrestations et un enlèvement de journalistes ont été rapportés en République démocratique du Congo.
Des sources de la société civile ont signalé l’enlèvement d’un journaliste d’une station de radio locale en République démocratique du Congo, dans la province du Sud-Kivu (nord-est), par des inconnus.
Cinq journalistes d’AfricaNews à Kinshasa – Octave Mukendi, Bruce Landu, Roddy Bosakwa, Dan Luyila et Laurent Omba – ont été arrêtés aux premières heures du 19 octobre et détenus au siège du département du renseignement de la police nationale. On pense que ces arrestations auraient été liées à la publication d’un rapport d’AfricaNews sur une enquête interne relative à un prétendu détournement de nourriture dans une académie de formation de la police.
Sylvanie Kiaku, journaliste à l’hebdomadaire La Percée, également basée à Kinshasa, a été arrêtée, détenue et accusée de diffamation criminelle.
La police au Zimbabwe a arrêté un groupe de jeunes bien organisés qui ont attaqué des vendeurs et brûlé des journaux propriété de l’entreprise privée stable Alpha Media Holdings.
Des journalistes ont été agressés devant le tribunal de première instance de Kitwe en Zambie. Ils couvraient une affaire judiciaire de détournement de propriété entre un homme d’affaires éminent et ses associés. Des amis des hommes d’affaires ont insulté les journalistes et agressé Kashete Sinyangwe, caméraman de la Zambia National Broadcasting Corporation.